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de districts et que dirige et surveille un comité central, composé d’un membre par État, d’un secrétaire et d’un président. Ce sont quelquefois des hommes politiques que l’on choisit pour ces fonctions importantes ; ce sont toujours des tacticiens habiles, des politiciens consommés.

Nous nous proposons d’étudier et de montrer ce mécanisme à l’œuvre, d’indiquer comment on réunit l’argent nécessaire aux dépenses de toute nature d’une élection présidentielle ; à quelles sommes ces dépenses s’élèvent ; où et comment se recrute le personnel des agens électoraux de tout ordre ; ce qu’une élection présidentielle coûte actuellement à chacun des deux partis et enfin ce qu’elle coûte à l’Union américaine. Les sources auxquelles nous empruntons les documens dont nous nous servirons pour cette étude des coulisses de la vie politique aux États-Unis ne laissent aucun doute sur leur exactitude. Si les chiffres par lesquels se terminera ce travail paraissent exagérés, nous rappellerons que, si l’on peut établir exactement le montant des dépenses officielles de chaque parti, l’on ne saurait qu’évaluer approximativement les pertes causées au pays par une crise politique. Sur ce dernier point, nous citerons les appréciations d’hommes d’affaires éminens et compétens, capitalistes, banquiers, industriels, directeurs de chemins de fer, négocians, courtiers, hommes de tous les partis, dont les évaluations diffèrent cependant de peu et, entre ces évaluations, nous nous arrêterons aux plus modérées.


I

Le président des États-Unis est élu par le suffrage populaire, non à la pluralité des votes directs, mais à la majorité des votes électoraux attribués, selon le chiffre de leur population, à chacun des États de l’Union. Il en résulte qu’un candidat peut réunir la majorité des voix sans obtenir la majorité des votes électoraux, et cela par un calcul fort simple. La Pensylvanie, par exemple, peut donner 50,000 voix de majorité, 100,000 même, à l’un des candidats ; elle ne lui donnera jamais que les 32 votes électoraux dont elle dispose. Cette majorité de 50,000 ou de 100,000 grossira le chiffre des voix ralliées sur le nom du candidat, mais elle n’ajoutera rien au nombre des votes électoraux qui comptent seuls. Tel fut le cas pour Cleveland en 1888. Le Texas lui donna 146,461 voix de majorité, un millier suffisait pour lui assurer les 13 votes électoraux de l’État. Sur les 11,386,632 suffrages populaires exprimés, 5,538,434 allèrent à Cleveland, alors que 5,440,551 seulement se groupaient sur le nom de Harrison. Il avait donc une