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LA FAYETTE
PENDANT LE CONSULAT ET LE PREMIER EMPIRE


I.

L’Europe entière s’était émue en apprenant la délivrance des prisonniers d’Olmütz. La Fayette, à peine arrivé à Hambourg, recevait la visite de ses anciens aides-de-camp accourus de Paris ; Klopstock, le noble poète, venait l’embrasser, et Archinoltz, un de ses fidèles correspondans, ne le quittait plus. C’était à qui lui écrirait, mais parmi tant de lettres affectueuses, aucune ne lui remua plus le cœur que celle envoyée par Mme de Staël dès la première nouvelle de sa prochaine délivrance.

« 20 juin 1797. — J’espère que cette lettre vous parviendra. Je voudrais être une des premières personnes qui vous parlât de tous les sentimens d’indignation, de douleur, d’espérance, de crainte, d’inquiétude, de découragement, dont votre sort, pendant ces cinq années, a rempli l’âme de ce qui vous aime. Je ne sais pas s’il est possible de vous rendre supportables vos cruels souvenirs. J’ose cependant vous dire que, pendant que la calomnie a défait toutes les réputations, que les factions se sont attachées aux individus, ne pouvant triompher de la cause, votre malheur a préservé votre gloire ; et si votre santé peut se remettre, vous sortez tout entier de ce tombeau, où votre nom a acquis un nouveau lustre.