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tres cubes d’une eau excellente. Avec les 130,000 ou 150,000 mètres cubes qu’on possédait déjà, c’était peut-être, séduisant mirage, 400,000 mètres cubes, — soit 160 litres par tête d’habitant. Certes, on en a plus à Rome, où l’eau de source coule à raison de plus de 1,000 litres par habitant. On en a plus aussi dans certaines villes des États-Unis. Nées d’hier, elles étaient, il faut le reconnaître, plus à l’aise que nos vieilles cités, pour s’installer convenablement du premier coup. Mais on n’en a pas plus à Londres, — et ce n’est pas de l’eau de source, — mais on en a moins à Berlin, à Bruxelles, et somme toute, 150 à 160 litres à dépenser chaque jour dans la consommation domestique semblent largement suffisans.

On pouvait, après cela, laisser aux statisticiens officiels la satisfaction de totaliser suivant leur coutume l’eau de source avec l’eau de rivière, l’eau pure avec l’eau contaminée, et en conclure que le Parisien allait être un des citoyens les plus arrosés de la chrétienté. Cette façon de présenter les choses a pu peut-être entretenir autrefois des illusions sur nos ressources réelles. Mais on est trop averti aujourd’hui et la chose ne tire plus à conséquence.

III.

Quel était donc ce projet qui devait plus que doubler la quantité d’eau potable ? Il datait de la fin de 1884. Il n’avait pas été aussi simple qu’on pourrait le penser, de trouver dans un rayon abordable aux alentours de Paris le nouveau volume d’eau, dès cette époque pressenti nécessaire, et qui devait être tout de suite de 200,000 mètres cubes, un peu après de 250,000 mètres cubes. Les recherches étaient circonscrites, par la conformation topographique elle-même, à trois régions distinctes, les seules où convergeaient des sources de quelque importance. La première forme comme un arc de cercle étendu de 150 kilomètres environ, allant depuis Cravant, au confluent de l’Yonne avec la Cure, au-dessus d’Auxerre, passant à Châtillon-sur-Seine, à Chaumont-en-Bassigny, et s’arrêtant à Andelot, sur le Rognon, contre le revers occidental du plateau de Langres. C’est le pied de la formation oolithique de la Bourgogne, nous l’avons déjà dit. Les eaux y sont pures et fraîches, elles sont abondantes. Aucun groupe cependant n’était de nature à fournir à lui seul le volume requis, et il eût fallu en réunir plusieurs par des dérivations accessoires. Le groupe de Cravant était d’ailleurs trop bas. Mais à partir de Châtillon, l’altitude est de 200 mètres, et va s’élevant progressivement jusqu’à 256 à Rimaucourt, près d’Andelot. Combinée avec