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du propriétaire, et celui-ci, qui avait acquitté les dettes de Spinoza, et notamment les frais de ses funérailles, exigeait, avant tout, qu’on le remboursât de ses avances. Rebecca s’y était refusée obstinément ; « elle voulait voir clair et savoir si, les dettes payées, il lui reviendrait quelque chose. » A ses risques et périls, Spyck dut procéder à une liquidation. En conséquence, sur sa requête, le 2 mars les scellés étaient levés, et le même notaire Van den Hove dressait un second inventaire « des biens et meubles délaissés par feu le seigneur Bénédict de Spinoza, né à Amsterdam, décédé le 21 février 1677, à la maison du sieur Spyck, résidant à La Haye, le tout conforme à ce qui se trouvait à la maison dudit sieur Spyck. » Notons surtout, ce qui est ici d’une importance capitale, que ce second inventaire comprend des livres, comme déjà en comprenait le premier. Mais, cette fois, ces livres ne sont plus mentionnés simplement en bloc. Tous les volumes se trouvent énumérés séparément dans ce second inventaire, et chaque ouvrage y fait l’objet d’un article distinct.


IV

Spyck cependant ne crut pas devoir disposer immédiatement de ce mobilier, et ce ne fut qu’après deux sommations légales inutilement adressées le 30 mars et le 12 septembre 1677 aux héritiers de Spinoza d’avoir à acquitter les charges de la succession, qu’il se décida à mettre en vente les effets de l’illustre défunt. La Gazette de Harlem du 2 novembre annonçait cette vente dans les termes suivans : « On se propose de vendre publiquement, jeudi prochain, le 4 novembre, à neuf heures du matin, au domicile de M. Hendrick van der Spyck, peintre, au Pavilionensgracht, en face du Dubelet Straat, au plus offrant et dernier enchérisseur, les meubles laissés par feu M. Bénédict de Spinoza, livres, manuscrits, lunettes d’approche, loupes, entre autres des verres polis et plusieurs instrumens pour polir des verres, entre autres des moulins et de grandes et petites assiettes de métal, etc. » La vente se fit effectivement au lieu et dates indiqués, ainsi que l’atteste le compte-rendu par le commissaire-priseur Pieter de Graeff. « Le 4 novembre 1677, à la demande de M. Hendrick van der Spyck, en ce cas autorisé par la justice de La Haye, pour vendre le mobilier laissé par feu Bénédict de Spinoza, dans la maison du défunt sur le Burgwal ; le montant en était de 430 florins et 13 sous[1]. » Frais déduits, le montant n’était plus que de 392 florins 19 sous et 8 deniers. Le prix de cette vente étant consigné, Rebecca y mit

  1. Cf. Servaas, ouvrage cité.