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feu, par la bise de décembre, ou quand il cherche à nous attendrir :


Fait au temps de la dicte date
Par le bien renommé Villon,
Qui ne mengue figue ni date.
Sec et noir comme escouvillon.
Il n’a tente ne pavillon
Qu’il n’ait laissé à ses amis
Et n’a mais qu’ung peu de billon
Qui sera tantost à fin mis.


Car il avait eu 100 écus d’or du petit sac de grosse toile volé au collège de Navarre ; 100 écus d’or étaient une somme importante en l/i56 et qui aurait suffi à lui assurer une vie aisée pendant deux ou trois ans. Il voulut peut-être les mettre en sûreté, ou il craignit les poursuites et laissa ses compagnons se tirer d’affaire, ou il essaya véritablement de préparer un nouveau vol à Angers. En effet, le 16 décembre 1456, un nommé Chevalier appela au parlement du juge d’Angers, sous prétexte qu’il avait été injustement emprisonné. À quoi le juge d’Angers fit répondre « que, à Angiers, ont esté faiz puis naguères plusieurs larrecins, pilleries et roberies... et fut sceu que avoient esté fais par Jehan Doubte et Jehan Ghevalier qui sont compaignons vagabondes ; et aprez information sur ce faitte, furent pris Doubte et Chevalier se mit en franchise. Dit que les appelans estoient cause de tous lesdicts larrecins et pilleries et recevoient en leur hostel lesdicts larrecins et les robeurs et toutes gens de mauvais gouvernement. » Il serait peu étonnant que cette bande, qui volait à Angers entre août et décembre 1456, se fût composée de coquillards et que Villon eût été tenté de préparer des affaires pour eux, puisqu’il en connaissait de bonnes dans le pays.

Il est certain que François Villon partit pour Angers à la fin de l’année 1456. Avant de quitter Paris, il avait laissé à ses amis un poème satirique, auquel il donnait le titre de Lays, où il voyait le double sens de Legs, puisque c’était un testament. Le poème eut beaucoup de succès aussitôt, et tut copié et répandu, mais avec le titre nouveau de Testament, que Villon n’approuva point. Il ne devait, d’ailleurs, rentrer à Paris qu’à la fin de l’année 1461, avec le manuscrit du Grand Testament, qui lut composé en province. Il craignait d’être poursuivi dans l’affaire du collège de Navarre, et n’ignorait point qu’il avait été dénoncé à l’officiahté. On ne décou- vrit le vol qu’au mois de mars 1457. La somme dérobée apparte- tenait à la communauté des doyen, maîtres, régens et écoliers de