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prennent à l’extérieur, et même quand les enfans vont s’amuser hors des salles d’étude, celles-ci ne sont pas suffisamment ventilées pendant les dix ou quinze minutes que dure la suspension du travail. L’enfant revient trop tôt dans un milieu mal débarrassé des produits de respiration de ses camarades. Si ce régime suffit à l’hygiène du cerveau et même à celle des muscles, il ne suffit pas à l’hygiène des poumons. Il faudrait faire plus. La récréation devrait être assez longue pour permettre aux locaux scolaires de recevoir une aération suffisante, elle devrait toujours avoir lieu soit à découvert, soit sous des abris largement ouverts de façon à garantir de la pluie, tout en permettant la libre circulation de l’air pur. L’exercice pris dans la salle même où les enfans ont séjourné présente des inconvéniens qui lui ôtent à peu près toute sa valeur hygiénique. En effet, le travail des muscles augmente dans de grandes proportions le besoin de respirer, et, par conséquent, la consommation de l’air ambiant. Mais ce surcroît de respiration qui est, nous le disions tout à l’heure, le bénéfice essentiel de l’exercice, ce surcroît de respiration n’est plus un bénéfice, mais plutôt un danger, quand il introduit dans la poitrine un air vicié.

Que dire aussi des récréations de nos grands lycées de Paris, où une centaine d’enfans, dans l’intervalle d’une classe et d’une étude, sont entassés pendant une heure dans ces cours étroites entourées de bâtimens à quatre étages, véritables cours de prison où l’air ne se renouvelle pas plus qu’au fond d’un puits ! Le défaut d’air est certainement le plus grand vice de nos installations scolaires, au moins dans les grandes villes, et ce sera justement le vice le plus difficile à détruire, car il est intimement lié à un autre vice plus radical, l’installation de nos maisons d’éducation au cœur même des agglomérations urbaines où il est si difficile de trouver des espaces suffisans. Le jour est sans doute bien éloigné, où l’on se décidera à construire les lycées à la campagne, ainsi que le demandent tous les hommes compétens qui s’intéressent à la régénération de notre race ; en attendant, nous n’avons qu’un moyen de donner aux enfans de l’air de bonne qualité et en quantité suffisante : c’est d’adopter pour eux une forme d’exercices physiques qui leur lasse quitter de temps en temps les établissemens, — j’allais, dire les prisons, où ils sont tenus renfermés. Que trois après-midi chaque semaine soient complètement consacrés à des exercices physiques pris non dans des salles de gymnastique ou dans les étroits préaux des locaux scolaires, mais sur une grande pelouse ou tout au moins sur une grande place publique. Les poumons de l’enfant, excités par l’exercice, introduiront ainsi, à chaque séance, dans le sang une provision d’oxygène