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qu’à une traduction en marbre, et si sa Bacchante, tombée à la renverse en combattant avec un Satyre, est un morceau d’une exécution vive et savoureuse, il faut avouer que la contorsion des membres donne des lignes tourmentées d’un effet peu agréable à l’œil. Parmi d’autres bonnes études de nu, on ne doit pas oublier, comme marbres, le Repos de M. Boucher, figure d’une attitude un peu maniérée, mais savamment exécutée dans ses parties principales, la Bacchante couchée de M. Moreau-Vauthier, d’un style libre et large, une Source élégante de M. Mengue ; comme plâtres, la Flora, nerveuse et alerte, de M. Ferrary, le petit groupe décoratif et spirituel de deux petits Faunes se regardant dans une source, Au miroir, par M. Larche, la très douce et plaisante Muse des Bois, adossée à un arbre, par M. Albert Lefeuvre. Nous aurons sans doute plus tard l’occasion de reparler de ces agréables créations lorsqu’elles se représenteront, dans quelques années, revues et complétées, sous leur forme définitive.

La sculpture, au Champ de Mars, occupe peu de place, du moins sous sa forme habituelle et primordiale. Les œuvres de sculpture les plus curieuses qu’on y trouve sont peut-être des œuvres de la sculpture appliquée à des objets d’art mobilier par des procédés industriels dans la nouvelle section d’art décoratif qu’a organisée, ou plutôt développée la Société nationale. Il s’y trouve, entre autres, une collection considérable, non-seulement de bustes en terre cuite, mais d’objets de céramique courante modelés par M. Carriès, qui portent tous l’empreinte d’un art habile, sensible, original. Un grand nombre de bustes, disséminés dans les galeries de peinture dus à MM. Dalou (bustes de MM. Lozè, Francis Magnard, Jules Jouy), Rodin, Antony Noël, Alfred Lenoir, Gaston Leroux, etc., y montrent l’art du portrait exercé avec autant de pénétration par les manieurs du ciseau que par les manieurs de la brosse. Parmi les ouvrages plus importans exposés dans le jardin, les statues en bronze d’Eugène Pelletan et du Général Raoult, par M. Aube, d’une allure aisée et naturelle, une très bonne étude de Femme couchée (une Madeleine nue, étendue, sur la face, se cachant la tête, sur un lit de paille), par M. de Saint-Marceaux, une figure, très fermement modelée, d’une attitude vide et expressive, avec d’intelligentes réminiscences des prophètes de Donatello, l’Ecclésiaste par M. Michel Malherbe, une figure symbolique de jeune homme tenant une épée dans son fourreau, d’un caractère assez saisissant, quoique un peu maniéré, dans le goût des préraphaélites, par M. Dampt, Au seuil du mystère, sont celles qui attirent d’abord les regards. Plusieurs autres noms connus y paraissent encore, soit avec des œuvres importantes et estimables,