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UN HISTORIEN
DE
LA SOCIETE PRECIEUSE
AU XVIIe SIECLE

BAUDEAU DE SOMAIZE

Il est des écrivains dont tout le monde connaît le nom et dont personne ne lit les œuvres. Le plus souvent médiocres, nuls quelquefois, ils doivent à un ensemble de causes fortuites une réputation qu’ils n’auraient jamais atteinte sans elles. Tantôt un critique illustre les a vertement appréciés au passage et ils sont venus jusqu’à la postérité avec l’arrêt de leur juge ; ainsi les mauvais poètes latins, dont il ne reste pas un vers, mais qui ont reçu d’Horace l’immortalité du ridicule ; ainsi l’abbé Cotin, l’abbé de Pure et quelques autres « victimes » de Boileau. D’autres fois, une bonne fortune, où l’intention n’avait pas plus de part que le talent, leur a fait jouer un rôle dans un épisode considérable de l’histoire littéraire ; ils ont saisi une idée qui flottait dans l’air et l’ont exprimée fort mal, mais ils sont les seuls à s’en être avisés ; une scène intéressante se déroulait quelque