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parlement à Melbourne ait montré un empressement extrême à accepter sans discussion la constitution adoptée le 9 avril 1891 par la Convention nationale australasienne de Sydney, laquelle créerait une fédération dont les corollaires inévitables seraient l’union douanière des colonies et l’établissement autour d’elles d’un véritable cordon sanitaire protégeant les manufacturiers de l’Union contre les importations de l’industrie étrangère, y compris celles de l’Angleterre ; cela porterait d’un seul coup à 4 millions le nombre des cliens de Victoria.

Depuis leur émancipation, les colonies ont généralement subi des influences semblables, et les législatures locales ont abrogé un grand nombre de lois d’origine britannique pour les remplacer par des statuts dont le libéralisme ferait pâlir la majorité des Anglais eux-mêmes. La séparation absolue de l’Église et de l’État, l’instruction publique libre, obligatoire et séculière, le scrutin secret, l’application du principe électif à toutes les organisations ayant un but public quelconque, et maintes autres dispositions du même caractère ultra-libéral, forment la base des institutions politiques australiennes actuelles, dans une mesure plus ou moins grande suivant l’état social plus ou moins avancé de chacune des provinces.

La législation domaniale est également différente dans chaque province suivant le caractère général du pays et son degré de préparation pour la colonisation pastorale ou agricole. Une diversité semblable d’intérêts ne pouvait manquer de créer des rivalités que le temps ne ferait qu’envenimer. Dès lors, la fédération à courte échéance des colonies australasiennes ou tout au moins celle des États australiens se présentait à l’esprit d’un homme tel que Parkes, comme une nécessité politique urgente. Son expérience du passé, sa connaissance approfondie du caractère et du tempérament des hommes de sa race, et par-dessus tout une étude sérieuse des grandes lois qui gouvernent la marche des sociétés humaines, lui faisaient prévoir le moment où un conflit toujours croissant d’intérêts et d’ambitions amènerait infailliblement à sa suite la division et la haine. Il leur présenta donc une théorie politique qui, sans toucher à l’organisation intérieure des colonies, résumait leurs aspirations communes et amenait ainsi l’évolution d’un idéal national destiné à satisfaire leurs ambitions actuelles et les plus brillans rêves d’avenir. Le succès de cette politique à la conférence de Melbourne en 1890, ainsi que nous l’avons dit dans un précédent chapitre, avait été complet. Parkes triomphait sur toute la ligne, il avait réussi à faire accepter ses vues à l’unanimité par les membres de cette conférence, lesquels