Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 111.djvu/399

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sur le sol australien ; quelques officiers instructeurs seuls sont quelquefois engagés en Angleterre et payés par telles colonies qui les emploient pour ce service spécial, mais c’est tout. Chaque province ayant adopté un système de recrutement et une organisation militaire intérieure différens, il est facile de comprendre que ce manque d’uniformité nuirait considérablement à leur défense effective, en supposant le cas fort peu probable d’une attaque étrangère. En outre, les soldats de telle ou telle province ne pouvant pénétrer sur le territoire de la colonie voisine sans une autorisation qui ne peut être obtenue que des mains du parlement local, on conçoit quelles difficultés pourraient surgir en cas de guerre, par suite de la rapidité des mouvemens militaires modernes ; une colonie pourrait être envahie, rançonnée et dévastée pendant que ses voisines délibéreraient encore sur l’opportunité de l’aider à se défendre. Et puis comment s’entendre sur la question du commandement en chef, celle de l’intendance et des transports, et cent autres détails pouvant, au moment du danger, créer une confusion dont les résultats pourraient être désastreux ?

Le rapport du major-général Edwards, qui soulevait toutes ces questions et mettait à nu la faiblesse des moyens de défense dont les colonies, dans leur état de division actuelle, pouvaient disposer à un moment donné, servait admirablement les projets de sir Henri Parkes. Ce fut alors qu’il adressa une série de remarquables dépêches à ses collègues des différentes provinces, requérant leur concours pour réunir une convention nouvelle devant laquelle serait discutée non-seulement la question de la défense nationale, mais celle bien autrement importante à ses yeux de la fédération parlementaire des colonies de l’Australasie britannique. Les provinces déjà représentées au conseil fédéral de 18S3 ne voulant point condamner leurs actes passés par une adhésion trop ouverte à une convention nouvelle et indépendante, sir Henri Parkes se déclara prêt à rencontrer sur terrain neutre les membres du conseil fédéral, et entraîna les autres colonies, qui avaient jusque-là suivi la ligne de conduite indiquée par la Nouvelle-Galles du Sud, à envoyer également leurs délégués. La conférence se réunit au mois de février 1890 dans la grande capitale de la colonie de Victoria, sous la présidence de l’honorable Duncan Gillies, alors premier ministre de cette importante province. Là, malgré son grand âge et une santé qui à ce moment donnait de grandes inquiétudes, sir Henri Parkes prit part aux principales séances, et prononça plusieurs discours empreints d’une ardeur et d’une énergie d’expression qui finirent par triompher de l’hostilité ouverte de plusieurs délégués, et il réussit à obtenir l’assentiment de tous à la