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différens points de la France très éloignés les uns des autres, nous ont paru avoir conservé tous les caractères de leur race et n’avoir rien perdu ni gagné à être élevés dans telle ou telle contrée. Ce qui confirme encore notre opinion, c’est que les chevaux achetés en Angleterre et chez nous et transportés jusqu’en Amérique ne se transforment pas.

Nous pensons ne pouvoir trop nous élever contre cette exagération de l’influence du sol et du climat sur l’élevage de nos chevaux, car il en résulte que les éleveurs, comptant sur les grandes qualités de certains herbages, continuent à employer pour la reproduction des jumens mauvaises ou médiocres et négligent de donner de l’avoine à leurs poulains. Or ce qu’il faut qu’on sache bien, c’est que le cheval est et reste ce que l’ont fait son père et sa mère et que, s’il est possible par l’alimentation, les soins et l’exercice de développer ses aptitudes naturelles, rien ne peut lui donner celles qu’il n’a pas. Au lieu de faire des dépenses, même minimes, d’entretien sur des chevaux de mauvaise origine, il est beaucoup plus sûr et plus économique de faire naître de bons produits qui ne coûtent pas plus cher à bien nourrir, qui coûtent même moins cher et ont toujours plus de valeur.

Les haras fournissent les pères, qui généralement sont bons, qui, tout au moins, sont les meilleurs que nous possédions actuellement. C’est donc surtout le choix des mères qui doit préoccuper les éleveurs, et ils y doivent apporter la plus grande attention, car la mère transmet à ses descendans ses qualités et ses défauts physiques au moins aussi sûrement que le père. Chez tous les produits que nous avons examinés, les deux influences nous ont paru se manifester également sans qu’il fût possible de dire sur quelle partie du corps l’une ou l’autre agit plus particulièrement, il semble plutôt qu’elles se confondent dans toutes les parties. Du reste, dans les bons accouplemens, le père et la mère ne s’éloignant pas d’un même type, en admettant que, par exemple, l’avant-main du poulain tienne de l’étalon et l’arrière-main de la jument, il n’y aura rien de disparate dans l’ensemble. Quand on obtient des produits dits décousus, cela vient sans doute de ce que le père et la mère étaient de modèles trop différens. On ne sait toutefois rien de bien positif sur tout cela, et pourtant les physiologistes pourraient aujourd’hui étudier cette question chez les animaux d’après des documens précis, puisque, d’une part, les origines sont établies par les cartes de naissance et que, d’autre part, les photographies des pères, des mères et de leurs produits peuvent fournir d’excellens moyens de démonstration.

Du reste, quelles que soient les règles qu’on pourra donner pour les accouplemens, l’application de ces règles restera toujours pour