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astronomie, géologie, histoire naturelle, haute littérature ; s’il est maître de pension, ce degré ne dépassera pas les classes de grammaire, ni les premiers élémens de géométrie et d’arithmétique ; il laissera aux lycées et collèges de l’État leur domaine intact, les humanités proprement dites, les cours supérieurs et moyens de l’instruction secondaire. — En second lieu, dans les villes qui ont un lycée ou un collège, il n’enseignera chez lui que ce que l’Université n’enseigne pas chez elle[1] ; à la vérité on ne lui ôte pas les très petits garçons ; il peut encore les instruire, il les garde ; mais, au-dessus de dix ans, il conduira tous ses élèves au collège ou au lycée, ils en suivront régulièrement les classes, en qualité d’externes. En conséquence, chaque jour et deux fois par jour, il les mène et ramène de sa maison à l’établissement universitaire et de l’établissement universitaire à sa maison ; avant la classe, dans l’entre-classe, après la classe, il leur répète la leçon que, le jour ou la veille, ils ont reçue hors de chez lui ; en outre, il les loge et les nourrit ; à cela se réduit son office. Il n’est plus qu’un auxiliaire exploité et surveillé, un subalterne, préparateur et répétiteur de l’Université, une sorte de maître d’étude et d’aubergiste non payé, au contraire payant, et à son service.

Cela ne suffit pas encore : non-seulement l’État recrute chez lui ses externes, mais il lui prend ses pensionnaires. « À compter du 1er novembre 1812[2], les chefs d’institution et les maîtres de pension ne pourront avoir d’élèves à demeure dans leurs maisons, au-dessus de l’âge de neuf ans, qu’autant que le nombre des pensionnaires que peut recevoir le lycée ou collège établi dans la même ville ou dans la résidence du lycée se trouverait au complet. » Ce complet sera de 300 pensionnaires par lycée ; il y aura « 80 lycées en activité » dans le cours de 1812, et 100 dans le

  1. Quicherat, ibid., III, 93 à 105. — Jusqu’en 1809, grâce à la tolérance de M. de Fontanes, M. de Lanneau avait pu garder chez lui la moitié de ses élèves, sous le nom d’élèves des classes préparatoires, ou pour les cours de français et de commerce ; néanmoins, il avait dû renoncer à l’enseignement de la philosophie. En 1810, il reçoit l’ordre d’envoyer au lycée, dans le délai d’un mois, tous ses élèves. À cette date, il y avait 400 pensionnaires à Sainte-Barbe.
  2. Décret du 15 novembre 1811, articles 1, 4, 5, 9, 17 à 19, 24 à 32. — Procès-verbaux des séances du conseil de l’Université impériale. (Manuscrits aux Archives du ministère de l’instruction publique, communiqués par M. A. de Beauchamp), séance du 12 mars 1811, note de l’Empereur communiquée par le Grand-Maître. « Sa Majesté demande qu’on ajoute les dispositions suivantes aux projets de décret qui lui ont été présentés : Partout où il y aura un lycée, le Grand-Maître fera fermer les institutions particulières jusqu’à ce que le lycée ait le nombre de pensionnaires qu’il peut recevoir. » — On voit ici l’intervention personnelle de Napoléon ; l’initiative du décret lui appartient ; il le voulait d’abord plus rigoureux, plus brusquement autoritaire et prohibitif.