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bref commandement du maître ; c’est aussi une occasion excellente de délier leur langue, d’assouplir leur gosier, car ils doivent accompagner eux-mêmes le maître de la voix. En outre, comme le fait remarquer l’abbé Tarra, ils finissent ainsi par acquérir l’idée de rythme et le sentiment de l’harmonie. Enfin on développe chez eux l’esprit d’attention, d’ordre et d’obéissance, si utile aux progrès de leur éducation. On a observé aussi que ces exercices combattent chez eux l’habitude qui leur est particulière de traîner les pieds.

Plus profitables encore et plus intéressantes sont les promenades que les élèves font deux fois par semaine, groupés par divisions, suivant leur âge et leur degré d’instruction. Tantôt, ce sont des visites aux musées de Paris, aux expositions de peinture, de sculpture, d’horticulture ; tantôt, c’est l’étude régulière et méthodique du Palais de l’Industrie, d’une gare de chemin de fer, de la manufacture des Gobelins, du Jardin des Plantes, du Jardin d’Acclimatation ; tantôt, c’est une excursion dans la campagne, dans un village de la banlieue, avec arrêt chez le boulanger, chez le cordonnier, chez le boucher, pour étudier tous les instrumens du métier. Le professeur qui accompagne chaque groupe d’élèves leur donne des explications sur place, explications qu’il leur fait reproduire oralement et qui font ensuite l’objet d’un compte-rendu écrit. C’est l’excellente méthode que nous avons vue déjà appliquée à toutes les parties de l’enseignement. On le voit, l’intelligence gagne autant que le corps à ces promenades.

Il faut avouer que, pour les soins plus particulièrement hygiéniques, l’institution des sourds-muets est beaucoup mieux partagée que nos lycées les plus importans. L’habitude des bains, trop rare encore pour les élèves de nos écoles, est ici très régulière et favorisée par un merveilleux aménagement. Dans une vaste salle de la maison, s’étend une belle et large piscine, dans laquelle les enfans viennent se plonger régulièrement tous les huit jours, par groupe de vingt. Des barres de bois ont été établies pour les petits qui, sans cette précaution, perdraient pied dans la partie la plus profonde de la piscine. Tous les mois, chaque élève est pesé, il est toisé une fois par trimestre ; quand la saison le permet, le bain est suivi d’une douche froide. Vingt cabines s’élèvent autour de la piscine, et là se trouvent savon, brosses, linge pour la toilette qui suit le bain. Des appareils à vapeur qui circulent tout autour de la salle y entretiennent une chaleur régulière. Cette création est récente ; elle fait grand honneur au directeur de l’institution, M. Javal.