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pareille position exige d’abord des finances prospères, ou, à tout le moins, élastiques : c’est pourquoi les Anglais et le gouvernement de l’Inde, dans toutes les provinces et notamment en Birmanie, ont, dans la mesure où la politique le permettait, pris tant de soin de se procurer des ressources par l’exploitation des richesses locales.

Je ne puis entrer dans le détail du budget des recettes. J’en dirai, d’un mot, l’esprit. Le commerce est, — dans la première période de colonisation, — la source de toute richesse : donc on favorisera le commerce ; on lui laissera le maximum de liberté ; on lui fournira le maximum de facilité. Ce faisant, on enrichira les colons et l’on grossira les recettes du trésor. Ces recettes toutefois, si besogneux que l’on soit, on ne prétendra pas les accroître à tout prix. Le fisc exigeant fait les contribuables indociles : on ne demandera que ce qu’il est raisonnable de demander ; et, si cette libéralité, jointe à ce dénûment, conduit au déficit, on s’en consolera : ce n’est encore que le temps des semailles ; vienne la moisson, elle paiera toutes les peines et tous les sacrifices.

Cette méthode, si simple, si logique et cependant si rarement suivie, a donné aux Anglais tout ce qu’ils en pouvaient attendre.

Le commerce de la Birmanie, largement outillé, n’a cessé de progresser. En 1886-1887, au lendemain de l’annexion, au plus fort de l’insurrection, il était de 328 millions de francs ; il s’est élevé en 1887-1888, à 383 millions ; en 1888-1889, à 351 ; en 1889-1890, à 394 ; en 1890-1891, à 449 millions. C’est, si on laisse de côté l’année exceptionnelle 1886-1887, une augmentation, en trois ans, de 14 pour 100. Et notre consul à Rangoon, M. Pilinski, dont j’ai déjà cité le rapport, ne laisse aucun doute sur la cause de cette augmentation : « Les affaires avec la Haute-Birmanie, dit-il, étaient presque complètement arrêtées… Mais, depuis 1887, le pays a été graduellement pacifié ; les paysans qui, en grande partie, avaient abandonné leur village, y sont retournés et se sont adonnés à la culture, et les affaires, momentanément ralenties, ont repris avec plus d’activité. »

Les chiffres que je viens de citer s’appliquent à tout le commerce extérieur de la Birmanie, au commerce avec l’Angleterre et au commerce avec l’étranger. Détail curieux et contraire à la commune opinion, la part de l’Angleterre dans ce commerce n’est pas très importante. Les importations de Birmanie en Angleterre ont été en 1886-1887, de 53 millions de francs ; en 1887-1888, de 39 ; en 1888-1889, de 35 ; en 1889-1890, de 57 millions. Les exportations d’Angleterre en Birmanie ont été en 1886-1887, de 35 millions de francs ; en 1887-1888 de 58, en 1888-1889, de 52 ; enfin, en 1889-1890, de 47 millions de francs ; soit, au total,