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qui hérita de cette fabrication et qui l’a gardée jusqu’à nos jours, mais sans qu’on ait jamais pu reprocher à ses produits la durée par trop parfaite des anciens draps de Bourges. Valençay eut aussi longtemps la réputation de fabriquer une excellente bonneterie. Lorsque Ferdinand VII, qui y avait été détenu par ordre de Napoléon, contracta un second mariage, en 1816, avec l’infante de Portugal, il fit venir de cette châtellenie les bas qui devaient entrer dans le trousseau de sa fiancée ; sous la Restauration, la duchesse de Berry y faisait faire ceux de ses enfans.

L’élevage des moutons y fut porté à un degré de perfection qui s’est toujours conservé. Aux entrées des rois et des gouverneurs dans leur bonne ville de Bourges, figuraient toujours des béliers, de blanches brebis, et jusqu’à un dieu Pan, le roi des pasteurs.

En 1552, furent créés les sièges présidiaux ; le siège de Bourges se distingua toujours par la sagesse et l’intégrité des hommes qui y figurèrent. On les institua pour combattre l’abus qui se faisait des appels en parlement et alléger par ce moyen la carte à payer des plaideurs. Même aujourd’hui on cherche à la rendre moins lourde, cette carte, lorsqu’il vaudrait mieux combattre l’esprit de chicane qui hante la moitié du genre humain. On institua aussi des recettes générales, et, dans chacune d’elles, une trésorerie générale des finances. La fiscalité reçut l’ordre de ne négliger aucune occasion d’augmenter les impôts, sans doute pour leur donner de l’occupation et justifier leur création. Les contribuables, qu’ahurissaient tant de réformes, cherchaient bien par des dons gracieux, argent, draperies, confitures de cotignac, volailles, gibiers, à attendrir le fisc, rien n’y faisait. Il fallait payer et plus que par le passé, pour les guerres, les apanages et autres charges dont le peuple ne tirait aucun profit.

Le règne de François II n’a laissé aucun souvenir dans le Berry, et celui de Charles IX n’a été qu’une suite de tueries faites au nom d’un Dieu qui ne pouvait en être l’instigateur. Issoudun, Sancerre, La Charité, Mehun et bien d’autres localités, étaient devenues villes tout à fait réformées. Plus de chants dans les églises désertes, plus d’envolées dans l’azur du ciel de joyeuses sonneries, disparus sous terre les moines aux faces rubicondes, les mendians aux loques sordides, aux voix lamentables, implorant une aumône sous les guenillères des monastères et des églises de campagne ; plus de sermons aux périodes enflammées appelant le courroux du ciel sur l’hérésie triomphante. La raideur protestante glaça tout, éteignit toute poésie : les villes semblaient mortes.

Il fallut cependant se décider à faire le siège des cités devenues par trop huguenotes, et on en chargea deux ardens catholiques,