Page:Revue des Deux Mondes - 1892 - tome 110.djvu/655

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

titre, mais à ce titre seul, ce que je vais en dire est amplement justifié.

D’après les chroniques du Berry, Nohant ne fut jamais qu’un fief sans importance, mouvant de Saint-Chartier, forteresse féodale longtemps occupée en force par les Anglais, et qu’ils ne livrèrent qu’après une prise d’assaut de Du Guesclin.

A la date du 13 août 1393, selon un parchemin tout jauni par le temps et que j’ai sous les yeux, une famille de Villalumini en était propriétaire. Il ressort encore de ce document que le château de Nohant, dont il ne reste plus que deux tours où des pigeons roucoulent, lut construit par un membre de cette ancienne famille, le noble Charles de Villalumini, écuyer.

En l’an 1529, la terre passa des mains des descendans de ce Charles en celles du « hault et puissant seigneur messire Philibert de Beaulieu, baron de Lignières, seigneur du Barroy, de Chaudemont-Meillant et autres lieux, » ainsi qu’en celles de « haulte et puissante dame Catherine d’Amboise, sa consorte et dame desdits lieux. » Il n’y eut pas vente, mais échange de la seigneurie de Nohant contre celle de Lestour, sise en pays de Beaujolais. Ces grands personnages, humiliés probablement de payer tous les ans une pension de la valeur de douze boisseaux de blé à leur curé, lui abandonnèrent en toute propriété un presbytère qui leur appartenait, mais à la condition de ne plus lui payer une si mince redevance.

Par suite de décès, mutations et échanges, la seigneurie de Nohant avec ses droits de haute, moyenne et basse justice, ses hommes et femmes serfs et de serve condition, y compris leurs postérités et séquelles, rentes, redevances, et à la condition de rendre foi et hommage aux seigneurs de Saint-Chartier, tomba aux mains de messire Olivier Guérin, seigneur de la Beausse ; puis, en 1604, en celles de deux demoiselles, Catherine et Madeleine de Rochefort. L’une d’elles, Catherine, s’étant mariée à Jean Catin, seigneur de Plotard-Champigny et Chillon, en Berry, apporta pour dot à son époux la seigneurie dont elle était restée seule propriétaire par la mort de sa sœur. Une fille unique était née de ce mariage ; elle épousa le seigneur Guillaume de Sève, conseiller du roi en ses conseils, et Nohant passa aux mains de ce couple en l’année 1620. Guillaume de Sève n’eut également qu’une fille, qu’il maria au chevalier Girard, comte de Villetaneuse. La comtesse, sa femme, qui mourut veuve et sans enfans, légua au marquis maréchal de Billancourt et à son frère, le comte de Billancourt, brigadier des armées du roi, Nohant et ses terres. Les deux gentilshommes vivaient largement, si largement que l’héritage fut saisi par leurs créanciers.