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comparer sans cesse ses premiers résultats avec ceux des fouilles pratiquées chez des peuples voisins ou parens ; comment lui échapperaient alors les influences exercées ou subies ? Comment la comparaison, exacte et patiente, ne lui décèlerait-elle pas des affinités de génie et de race, et même de certains indices de migration ? Plus l’auteur s’est contenu, avec une rigueur vraiment scientifique, plus il a pénétré. S’abstenant de conclure, s’attachant de préférence à montrer quel travail il faut accomplir encore avant de s’enhardir jusque-là, il donne à la science, par le seul mérite de son observation scrupuleuse et précise, beaucoup d’élémens d’induction historique.

Grâce aux travaux précédons de MM. Ghirardini et Helbig, quelques solides données de chronologie ne manquent pas à la reconstitution de ce lointain passé. La seconde des trois grandes périodes marquées par les différences de construction et de mobilier funéraire touche aux temps relativement connus, puisqu’on y rencontre des vases grecs avec peintures d’animaux, importation que l’on sait remonter au VIe siècle, à la même époque où les historiens nous montrent le premier traité entre Carthage et Rome et l’alliance de Carthage avec les Étrusques contre les Phocéens de la Corse. C’est le temps où la navigation et le commerce ont mis en continuels rapports l’Italie centrale avec l’Orient, avec l’Egypte, dans l’intérieur de laquelle les Grecs se sont établis en 656, avec la Phénicie, avec la Grèce et Chypre. C’est le temps où la Rome royale, celle des Servius Tullius et des Tarquins, emprunte les institutions, l’industrie, les arts de l’Etrurie. C’est la date d’une puissance et d’une richesse étrusque dont nous avons retrouvé avec étonnement les éclatans témoignages dans plusieurs tombes visitées au cours des cinquante dernières années. La tombe Regulini-Galassi, ouverte en 1836 à Cervetri, a donné ces magnifiques bijoux d’or, pectoral, bracelets et colliers, cette coupe d’argent avec figures travaillées à la pointe, ce lit de parade et ces vases de bronze pour lesquels Grégoire XVI a créé le musée grégorien du Vatican. La tombe ou grotte d’Isis à Vulci contenait, outre les objets en bronze et les fioles d’albâtre, ces œufs d’autruche ornés de peintures, et une inscription hiéroglyphique de la fin du VIIe ou du commencement du VIe siècle. La tombe del duce à Vetulonia et le trésor de Palestrina, trouvé en 1876, avec la célèbre coupe d’argent à inscription phénicienne conservée aujourd’hui au musée Kircher, achèvent d’attester cette incroyable richesse du monde étrusque et cette date : une partie du VIIe et le VIe siècle. Ce qu’on a rencontré dans ces mêmes sépultures d’inscriptions étrusques la confirme encore, puisque l’Étrurie n’a reçu son alphabet,