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célèbres éparses dans les musées de l’Europe devaient être des répliques de celles qu’Attale avait fait exécuter pour Athènes. On retrouvait sur les murs de l’autel de Pergame une lutte des dieux contre les géans ; mais certaines statues des musées de Florence, de Rome et de Naples, que des caractères communs rattachaient à l’École de Pergame, représentaient des Amazones et des Perses vaincus aussi bien que des Gaulois. On en conclut à bon droit que la vanité des rois de Pergame, flatteurs de la Grèce bien affaiblie, mais pourvue encore de valeureux artistes, avait célébré la défaite des Gaulois sous une quadruple forme, empruntée à la fois aux souvenirs mythiques et historiques. Il se confirma que le prétendu gladiateur mourant du Capitole était un Gaulois blessé, que le prétendu groupe de la villa Ludovisi connu sous le nom d’Arria et Pætus figurait un Gaulois égorgeant sa femme pour la soustraire à l’ennemi et se tuant lui-même aussitôt. L’Apollon du Belvédère parut avoir pu faire partie de cette épopée ; et en même temps d’autres œuvres célèbres, telles que le Laocoon et le Taureau Farnèse, furent attribuées au vaste ensemble d’une école naguère si peu connue.


II

Vienne maintenant, après toutes ces découvertes qui s’éclairent les unes les autres, après les patiens efforts d’observation, de comparaison, de critique attentive auxquels tant de nouveautés ont donné lieu, vienne un savant expérimenté, en possession d’une entière connaissance des grandes galeries de l’Europe, de l’art romain et de l’art grec ; si, résumant tout le travail de ces vingt dernières années, il entreprend de commenter les célèbres collections d’antiques formées à Rome depuis le XVe siècle, c’est-à-dire les musées du Vatican, du Capitole, du Laterano, de la villa Albani et du villino Borghèse, combien de fois n’aura-t-il pas à contester, en présence des statues et des bas-reliefs, les interprétations et les attributions régnantes ! Il montrera quelles restaurations téméraires ont défiguré un grand nombre d’œuvres antiques, auxquelles il rendra leurs formes véritables, leur sens original, leur authenticité.

C’est le service que va rendre l’ouvrage de M. Helbig. Nul n’était mieux préparé pour une telle entreprise. Il habite Rome depuis quelque trente années. Pendant plus de vingt-cinq ans, il a siégé aux côtés du regretté Henzen, à la présidence de l’Institut de correspondance archéologique de Rome. Henzen, dans les expositions et les discussions des séances publiques de la saison d’hiver, se