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et de l’induction, à de nouvelles lueurs sur le plus lointain passé de l’Occident, et celle de l’archéologie figurée, qui, en étudiant les restes subsistans de la sculpture antique, édifie l’histoire de l’art, élève et dirige notre sentiment du beau, et interprète les idées et les mythes du monde gréco-romain. Les abondantes découvertes auxquelles le renouvellement de Rome capitale a donné lieu ont suscité un essor d’exégèse que d’autres surprenantes découvertes survenues dans l’orient hellénique ont secondé, de manière à rendre cette période des vingt dernières années singulièrement féconde en résultats scientifiques. — Examinons d’abord ce qui intéresse l’histoire de l’art.


I

Les travaux de la Rome nouvelle ont commencé dans la vaste zone de l’Esquilin, entre les Thermes de Dioclétien, Sainte-Marie-Majeure et Saint-Jean in Laterano. Il y avait eu là, vers la fin de la république, des solitudes infectées par le mauvais air. J’y ai vu retrouver, en 1876, ces puticuli infâmes où l’on jetait au hasard les cadavres des esclaves et les charognes. Auguste voulut mettre fin à la contagion et au scandale. Par son ordre, de brillantes villas, ornées bientôt des chefs-d’œuvre de la Grèce, furent établies dans ces déserts, et ce fut l’origine de ces belles demeures, si célèbres pendant toute l’époque impériale, les jardins de Mécène et ceux de Pallas, les orti Tauriani, Lamiani, etc. Aussi le nombre est-il considérable des précieux monumens retrouvés en ces lieux depuis le temps de la Renaissance : des peintures antiques telles que celles qui sont conservées aujourd’hui dans une salle attenante au musée chrétien du Vatican, les Noces Aldobrandines, découvertes aux Thermes de Titus en 1616, les peintures de la via Graziosa d’après l’Odyssée retrouvées en 1848, les belles esquisses des amours fatales, etc., et des sculptures telles que ce célèbre Discobole, copie la plus parfaite que l’on connaisse du chef-d’œuvre perdu de Myron. Cette statue appartient aujourd’hui au prince Lancelotti : magnifique parure d’une magnifique demeure. C’est l’Esquilin aussi qui nous a rendu plusieurs des Niobides et le célèbre groupe des Lutteurs, œuvres acquises d’abord par le grand-duc Ferdinand de Médicis, au XVIe siècle, pour sa villa du Pincio, et transportées en 1769 dans la galerie de Florence. C’est enfin près des Thermes de Titus qu’on a retrouvé, le 14 janvier 1506, le groupe du Laocoon.

L’Esquilin était redevenu solitaire pendant les temps modernes. La reine Christine de Suède y allait secrètement faire de l’or et accomplir des opérations magiques dans les ruines de la