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prenait le parti de trancher le conflit par une révocation sommaire du ministère qui était censé exister encore, puisqu’il n’avait pas donné sa démission. Le roi, pour l’exécution à laquelle il se décidait, avait pourtant besoin de nouveaux ministres. Il paraît avoir appelé un instant à son aide M. Tricoupis, qui s’est prudemment ou habilement récusé, et alors le roi George s’est adressé à quelques hommes appartenant à ce qu’on appelle un tiers-parti. M. Constantopoulo, M. Philaretos, M. Sokhtouris, M. Mastrapas, qui se sont réunis pour former un ministère de miséricorde ou de transition.

Le roi a usé de sa prérogative, la légalité constitutionnelle est sauve, rien de mieux. On ne peut cependant s’y méprendre, ce n’est probablement pas fini, ce n’est peut-être au contraire que le commencement d’une dangereuse aventure. Le nouveau ministère sera obligé de dissoudre le parlement, de faire des élections, — et qu’arriverait-il si les électeurs irrités renvoyaient au parlement la majorité de M. Delyannis ? Ils iraient imprudemment peut-être jusqu’à l’extrémité de leur droit, comme le souverain est allé jusqu’à l’extrémité de son droit, et il est douteux qu’à ce jeu la Grèce regagne le crédit dont elle a besoin, le prestige des institutions libres qui ont été l’abri de son indépendance renaissante.


CH. DE MAZADE.


LE MOUVEMENT FINANCIER DE LA QUINZAINE

Le découvert qui, malgré tant de leçons de l’expérience, se reforme sur la rente française après chaque nouvelle étape de hausse, a dû payer encore, en liquidation de fin février, les frais très onéreux d’une campagne manquée. La crise ministérielle avait provoqué des ventes de spéculation. Les achats de la Caisse des dépôts et consignations ont aidé les haussiers à maintenir le cours de 96. Après la constitution du cabinet Loubet qui laissait les principaux départemens ministériels aux mains des précédens titulaires et notamment les finances à M. Rouvier, la partie était perdue pour les vendeurs. La liquidation leur a infligé un cours de compensation très élevé, 96.60, et un déport qui s’est tendu jusqu’à 0 fr. 18. Il ne restait aux vaincus qu’à procéder à des rachats. Commencés à 96.35 dès le lendemain de la liquidation, ces dégagemens de position ont porté le 3 pour 100 à 97 francs. Un temps d’arrêt s’est alors produit, et la rente, après une légère réaction