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et radieux, de résidence royale pleine d’agrément, de foyer sacré de la lumière qui s’échappe du sein de la mère de Dieu.

Le nouveau pasteur, quelque misérable que fût ce troupeau parqué au milieu de ruines et de décombres, n’hésita pas, dans son allocution, à proclamer que ses ouailles étaient les dignes héritiers des Athéniens d’autrefois ; il célébra la gloire quinze fois séculaire de leur cité, patrie de l’éloquence et de la sagesse, et évoqua le souvenir de la plus belle des fêtes antiques, la course aux flambeaux. Ayant reçu de la main de ses prédécesseurs le flambeau sacré, il ne voulait pas, déclara-t-il, se féliciter d’avoir pris possession de son siège pastoral avant d’avoir gagné, lui aussi, la couronne de l’athlète. Il exhortait ensuite les Athéniens à conserver les nobles mœurs de leurs aïeux, les plus libéraux et les plus hospitaliers des Grecs, les plus passionnés pour l’éloquence et la musique. « Bientôt, ajouta-t-il, je découvrirai, à leurs sentimens, si les citoyens actuels d’Athènes descendent de cette semence dorée. En tant que chrétiens, ils doivent surpasser de beaucoup les vertus d’Aristide, d’Ajax, de Diogène, de Périclès et de Thémistocle ou des combattans de Marathon. Autrefois, ajouta-t-il, brûlait sur l’Acropole la lampe éternelle de l’impiété, mais pareil à la lueur d’un ver luisant, ce feu follet pâlit lorsque le soleil de la vérité se leva avec la Cora virginale, et délivra la forteresse de la tyrannie de la fausse Parthénos…

Le Parthénon, en effet, s’il avait depuis longtemps perdu les ornemens dont l’avait doté la magnificence des contemporains de Périclès et de Phidias, s’était enrichi, surtout au temps de Basile, de peintures et d’une foule d’offrandes précieuses. On venait de près et de loin pour admirer une lampe en or, dont l’huile, affirmait-on, ne s’épuisait jamais.

Akominatos, on l’a vu par nos quelques extraits, se piquait à la fois de littérature et d’érudition ; ses discours et ses mandemens abondaient en citations mythologiques ou historiques, en prosopopées, en artifices oratoires de toute sorte. Tantôt, il conseillait aux stratèges athéniens de relever l’autel de la pitié, tantôt, il comparait l’empereur Isaac l’Ange, qui venait d’exterminer Andronic, à Harmodius et à Aristogiton. Bien de plus attachant que ce mélange d’enthousiasme pour le paganisme et de ferveur chrétienne, de réminiscences homériques et de versets empruntés à la Bible. Il prouve combien, en plein moyen âge, la tradition classique conservait d’empire sur l’esprit des lettrés grecs.

L’évocation d’un passé si glorieux était malheureusement plutôt de nature à déprimer les descendans dégénérés des Athéniens qu’à exciter leur émulation ; ne connaissant que le grec vulgaire, ils