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Après quarante-huit heures de mouillade, le tabac à fumer est haché et passe au torréfacteur, dans lequel il est soumis à une température qui ne dépasse jamais 80 degrés. On achève alors de le sécher en l’exposant à l’air froid, puis on le met en tas qu’on laisse fermenter pendant trois mois. Au bout de ce temps, on le met en paquets et on l’expédie dans les entrepôts.

La préparation du tabac à priser est un peu plus compliquée. Après l’époulardage, le mélange et la mouillade, les feuilles sont hachées et mises en tas de trente ou quarante tonnes, qu’on abandonne à l’action de l’air et qu’on soumet à une ventilation véritable, pour accélérer la fermentation. Celle-ci détermine une combustion lente qui donne au tabac sa couleur foncée et son arôme spécial. Au bout de trois mois, il est devenu noir et aggloméré en grosses masses résistantes. La fermentation y a fait naître de l’acide acétique et de l’ammoniaque. La nicotine, au contraire, a diminué de moitié ; de 6 pour 100 elle est tombée à 3. En prévision de ce déchet, on choisit les espèces les plus riches pour confectionner le tabac à priser.

À ce moment, on le râpe, on le tamise et on le dépose dans de grandes caves, où il continue à fermenter pendant dix ou onze mois. Pendant ce long travail, la température s’élève, dans la masse, jusqu’à 80 degrés, et la réaction alcaline apparaît. Elle est due à la disparition des acides malique et citrique. C’est alors que le montant du tabac se prononce. Il résulte du dégagement incessant de carbonate d’ammoniaque qui entraîne avec lui des vapeurs de nicotine. Quand la poudre est parvenue à cet état, on la met en tonnes et on la dirige sur les entrepôts.

Le tabac à chiquer est livré au commerce sous la forme de gros rôles et de rôles menu-filés. Les premiers se composent d’un intérieur analogue à celui des cigares et enveloppé, comme lui, d’une feuille de tabac qui sert de robe. Les rôles menu-filés sont constitués par la robe toute seule, roulée sur elle-même à l’aide d’un rouet. On choisit, pour la fabrication des rôles, les tabacs les plus riches en nicotine, et, quand ils sont confectionnés, on les trempe encore dans du jus de tabac concentré.

Les cigares ordinaires sont faits avec des tabacs de différentes provenances, et la robe avec du Kentucky léger. Les cigarettes de la régie sont en scaferlati.

La quantité de tabac livrée à la consommation, en France, va toujours en augmentant. En 1888 , elle a été de 36,020,985 kilogrammes, dont 24,805,716 kilogrammes ont été fournis par la culture indigène. Le reste a été acheté à l’étranger sous la forme de feuilles, de cigares, ou de tabacs fabriqués.

Ces achats représentent une valeur de 36,231,635 francs. Leur