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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 décembre.

Ainsi vont les choses ! Les années ont beau paraître longues et avoir l’air parfois de se traîner à travers tous les tracas d’une vie affairée, elles passent, elles se succèdent avec une étrange rapidité. Elles se suivent sans se ressembler, et à l’heure où s’ouvre une année nouvelle, à ce moment indéfinissable où il semble que tout va recommencer encore une fois, on se sent invariablement ressaisi par la même pensée.

On est toujours porté à se demander où nous allons, quels événemens, quelles surprises heureuses ou décevantes nous attendent dans une carrière nouvelle, ce qui en sera de la paix du monde, des affaires morales, politiques ou matérielles des peuples, de nos destinées nationales. On ne le sait pas : c’est en vain qu’on cherche à déchiffrer l’énigme, à pénétrer cet avenir mystérieux qui ne se dévoilera pour nous que jour par jour, que nous ne connaîtrons peut-être que trop. On salue cette année nouvelle de confiance, avec la meilleure volonté, non cependant sans une secrète et vague inquiétude de ce grand inconnu qui reste l’obsession de l’Europe. D’un autre côté, on ne peut se défendre, avant d’aller plus loin, de se tourner un instant vers le passé, vers ce passé d’hier, qui va disparaître, — de jeter un dernier regard sur cette étape qu’on vient de parcourir. Encore une fois, dans ce moment de halte, on se plaît à ressaisir d’un coup d’oeil tout ce courant des choses, à se demander ce qui a été fait pour /e bien des hommes, ce qu’on a gagné ou ce qu’on a perdu chemin faisant, ce qu’il y a eu de progrès ou de mécomptes ; on passe une suprême revue des mouvemens d’opinion, des événemens qui se sont accomplis. Ici du moins, tout est connu, tout est désormais révolu et irrévocable ; on sait à TOME ax. — 1892. 15