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descendant de réfugiés huguenots, et, à ce qu’il paraît, des anciens seigneurs de Roubaix et Tourcoing. Il porte d’argent à dix-huit merlettes de sable, posées cinq et quatre, au chef de gueules, l’écu timbré d’une couronne de marquis avec la devise : D’ores en avant.

L’un et l’autre représentaient les districts de l’Ouest ; M. de Roubaix, en particulier, était populaire à Fransche-Hœk, le « coin français, » vallée où abondent les Duplessis, les Dutoit, les Roux, les Malan, les Malherbe, les Faure, les de Villiers, toute la pléiade des arrière-neveux de nos religionnaires. On a vivement reproché à ces deux membres du conseil législatif le choix qu’ils firent de la ville du Cap pour leur meeting, dont l’effet devait être décisif à leurs propres yeux. Cape-Town n’est plus, de nos jours, une cité hollandaise, mais anglo-malaise. De quel droit son avis pouvait-il prévaloir sur celui des campagnes ? pourquoi deux hommes, mandataires de toute une région, accordaient-ils cette importance à un seul collège ? est-ce que les clameurs d’une poignée d’Asiatiques changeaient rien à l’état d’une question parfaitement connue, fixée, débattue et ressassée depuis deux ans ? Mais ces Asiatiques, les Malais, issus d’anciens esclaves, témoignaient alors à M. de Roubaix une confiance qui le liait en retour. Beaucoup étaient électeurs. Ajoutons que M. de Roubaix, orientaliste, a rempli les fonctions de consul-général de Turquie[1].

Au sortir de cette réunion, nos deux sénateurs se déclarèrent édifiés ; ils voteraient pour le régime parlementaire. Toutefois le bill, déjà ratifié par une chambre, franchit bien juste les barrières de l’autre, puisque ce fut à la différence d’une voix, celle de M. de Roubaix. On peut appeler ce Franco-Hollandais austral le Wallon de l’Afrique du Sud.

Le changement de système s’opéra fort simplement, au moyen d’un acte très court. De quoi s’agissait-il ? De rendre les ministres, ou, comme ils se nommaient encore, les membres du conseil exécutif, éligibles au parlement. Le reste serait sous-entendu. Du jour où le gouverneur pourrait choisir ses conseillers dans les chambres, il se garderait bien de les prendre ailleurs ; personne n’accepterait plus un portefeuille sans passer par l’élection. Les ministres, faisant partie des assemblées, dépendraient toujours de la majorité. Un préambule disait que le but de cette innovation était d’introduire « le mode d’administration exécutive communément appelé gouvernement responsable. » Rien de plus. Seulement

  1. Nous sommes redevable à M. de Roubaix de divers documens qui nous ont été d’un précieux secours pour cette étude.