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mouvement actuel vers la dissolution de ces liens m’est, pour ma part, très mal venu… Dans l’exercice du jugement qui vous appartenait de plein droit, vous avez décidé le rejet de mes propositions, vous avez préféré garder une forme de gouvernement peu satisfaisante, et le relâchement des liens que j’aurais voulu maintenir est déjà commencé. Les ordres pour le retrait des troupes ont été donnés ; il n’y a pas d’apparence qu’on les contremande. Nul doute, dès lors, que votre futur gouvernement, quel qu’il soit, ne doive s’inspirer du principe d’une entière dépendance de soi-même, et je lui souhaite bien sincèrement un succès sans mélange… L’organisation du nouvel ordre de choses sera facilitée par le passage de l’administration, de mes mains à celles de quelque autre qui peut-être se fera une idée plus encourageante des résultats probables… La fiction d’un intérêt impérial dans ces contrées (car c’est là, depuis longtemps, une fiction a pris fin. Tout ce qui s’y fera désormais devra être de nom, comme déjà en réalité, chose d’importance coloniale seulement. »


Après ce départ, de nouveaux personnages entrent en scène et le rideau se lève sur un troisième acte. L’ère du régime absolu s’est close par la quasi-insurrection de Cape-Town. Celle du parlement sans le parlementarisme a fini avec le mandat de sir Philip Wodehouse. Celle du self-government va commencer.

Au Colonial-Office, lord Kimberley a remplacé lord Granville. Il y apporte les mêmes vues avec moins de raideur. Au Cap, sir Henry Barkly débarque appelé d’Australie, où il vient de s’habituer au maniement d’une colonie autonome. L’Australie est restée, depuis lors, l’école préparatoire des gouverneurs et hauts commissaires envoyés dans l’Afrique du Sud. Dans ses instructions datées du 17 octobre 1870, lord Kimberley disait :

« Le gouvernement de Sa Majesté n’oublie pas que l’existence, dans les limites de la colonie, d’une nombreuse population indigène, numériquement supérieure aux habitans d’origine européenne, et en connexion avec des tribus similaires en dehors du territoire britannique, y rend le jeu du gouvernement responsable plus difficile que dans les colonies où la population blanche prédomine. Néanmoins il est d’opinion qu’en somme les colons agiraient sagement en adoptant les principes de self-government appliqués en Australie et dans la partie britannique de l’Amérique du Nord. »

C’était indiquer, en effet, le nœud du problème. Grâce à une série d’annexions, les blancs se voyaient alors dans la proportion