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L’ETAT D’AME
D’UN
MOINE DE L’AN 1000

LE CHRONIQUEUR RAOUL GLABER.

Il y avait, autour de l’an 1000, une légende dont l’élément historique semble aujourd’hui peu solide. Michelet, dans son histoire du moyen âge, a présenté le tableau saisissant des misères qui accablèrent la France sous les premiers Capétiens, à la fin du Xe siècle et au commencement du XIe. La plus aiguë de ces misères fut, selon lui, l’effroi des hommes à l’approche de l’an 1000 de l’incarnation. Le monde crut que le dernier soir de l’année fatale verrait la destruction de toutes choses, la terre et le ciel, l’humanité et l’église sombrant dans une catastrophe apocalyptique. Un écrivain ecclésiastique du temps, Raoul Glaber, dont la chronique est pleine d’épouvante, parut au noble historien l’un des témoins les plus touchans à interroger sur cet âge lugubre. Dans le récit que fait le vieux moine des calamités et des angoisses de son siècle, éclate comme un écho de la prophétie attribuée à Jésus par trois évangélistes : « Quand vous entendrez parler de guerre, prenez