Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 106.djvu/98

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

effective des opérations électorales, modifier un état de choses si menaçant pour la continuation de sa prépondérance politique dans l’Union. L’admission de six États nouveaux, tous du Nord, et par conséquent, tous présumés favorables au parti républicain, n’avait pas eu d’autre objet ; mais il lui fallait encore, au risque de fausser tout le mécanisme constitutionnel américain, s’assurer la possibilité d’imposer aux États du Sud, par la manipulation du vote des nègres, un nombre de représentans suffisant pour constituer au parti une inébranlable majorité.

Les chefs républicains ont dû toutefois abandonner la réalisation de cette partie purement politique de leur programme. Le concours de quelques démocrates leur était nécessaire pour la clôture de la discussion du tarif. Ils durent sacrifier le Force bill au succès de la législation douanière, comptant reprendre l’œuvre dans la session de décembre 1890 à mars 1891. Écrasés en novembre sous le coup de massue d’une défaite électorale sans précédent, il leur a fallu renoncer définitivement à forger une arme devenue inutile.

Revenons aux deux bills Mac-Kinley et au Silver bill, c’est-à-dire à la partie économique de la législation républicaine de 1890. Lorsqu’en 1888 ont été élus ensemble le président, M. Harrison, et le cinquante et unième congrès, les articles essentiels du programme (leading planks of the platform) étaient : le vote d’une loi plus libérale que le Bland Act de 1878 sur le monnayage de l’argent et l’accroissement du volume de la circulation monétaire ; le vote d’un tarif plus complètement protectionniste que le tarif douanier en vigueur depuis 1883.

La partie monétaire du programme fut assez promptement expédiée. Le Silver bill était en effet voté dans les premiers mois de 1890. Il doublait à peu près le montant des achats obligatoires d’argent métal par le trésor et devait, dans la pensée de ses promoteurs, produire une telle hausse dans les prix du métal que celui-ci reprit à peu près intégralement son ancienne relation de valeur avec l’or. La hausse s’est produite, en effet, tout d’abord, mais l’argent fin afflua de divers pays sur un marché où se trouvait un si puissant acheteur, et la spéculation, débordée, dut laisser retomber le métal blanc aux environs de ses plus bas cours. C’est une expérience manquée.

La solution de la question douanière se fit plus longtemps attendre que celle du problème de la circulation. Des efforts inusités d’éloquence se sont dépensés pendant de longs mois à la chambre des représentans et au sénat, à propos des deux bills présentés par le comité Mac-Kinley, surtout à propos du deuxième projet visant la refonte du tarif. Le 10 juin, enfin le premier bill fut définitivement voté. Il avait pour objet une révision des « règlemens pour