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une assez vive résistance, elle fut culbutée par la brigade du général Maison. Notre aile droite, victorieuse, se rabattit sur le centre des Espagnols, refoulant tout ce qui se trouvait devant elle. La droite des ennemis occupait des champs divisés par de nombreux murs de clôture. Elle était protégée par la batterie de huit pièces, placée sur le mamelon, qui nous faisait beaucoup de mal. Cependant, notre droite étant sur le point de tourner le centre des Espagnols et menaçant leur ligne de retraite, cette armée, d’environ 50,000 hommes, qui comprenait les meilleures troupes de l’Espagne, et parmi elles 15,000 hommes, revenant de Hambourg, sous les ordres du marquis de la Romana, se débanda, nous abandonnant le champ de bataille et son artillerie. Il y avait beaucoup de morts et de blessés de part et d’autre, mais surtout du côté des Espagnols. Ce champ de bataille, qui avait été vivement disputé par suite de notre infériorité numérique, était couvert de matériel et des débris ordinaires d’une armée mise en déroute.

Nous trouvâmes dans Espinosa des magasins très considérables de vivres, d’effets d’habillement, d’armes et de munitions. Tous ces objets étaient d’origine anglaise.

Vers la fin de l’action, la tête du 4e corps parut sur la rive opposée de la Trueba. Ces troupes se mirent à la poursuite des débris de l’armée espagnole, qui furent atteints à Reynosa et achevés. On les poursuivit sur les deux routes, qui conduisent à Santander et en Castille, et on ramena beaucoup de prisonniers.

Nous passâmes quatre jours sur ce champ de bataille, pour donner des soins à nos blessés, qui étaient dans une situation déplorable, et aussi pour faire du pain.

Le 1er corps n’était pas satisfait du duc de Bellune. Pour manquer de parole au maréchal Lefebvre, avec qui il avait combiné son mouvement, il s’était mis dans une situation critique et avait montré ensuite peu de fermeté. Ce fut le général Maison qui reconnut le véritable point d’attaque, et qui, avec sa brigade, décida la victoire. Le 1er corps, composé d’excellens régimens, conduits par des hommes du plus grand mérite, n’était pas en très bonnes mains.

Le 14 novembre, nous nous mîmes en marche, nous dirigeant vers les hautes montagnes où l’Ebre et la Pisuerga prennent leurs sources. Après bien des fatigues nous arrivâmes à Reynosa.

Le 18, nous descendîmes la Pisuerga, par sa rive droite. Nous trouvâmes quelques vivres, qui réparèrent un peu les forces de nos soldats épuisés par de grandes et longues privations.

Le 19, nous étions en pleine marche, nous dirigeant sur Ségovie ou Valladolid, quand nous reçûmes l’ordre de revenir à