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par le patriotisme, occupent, comme d’habitude, une assez grande place dans la nef. Le plus volumineux, et qui ne réunit pas moins de sept figures colossales, est le Monument national de Costa-Rica, par M. Louis Carrier-Belleuse. On y voit, sur le devant, un cadavre de flibustier déjà puni, puis un autre flibustier qui s’enfuit, et, derrière, debout, la république de Nicaragua, troublée par l’invasion, mais soutenue par sa voisine Costa-Rica. Trois autres républiques centro-américaines, représentées par des indigènes, accourent encore au secours de leurs sœurs. Ce groupe, très mouvementé, est traité avec franchise et vigueur, sans déclamation théâtrale, ce qui est difficile à éviter dans des scènes de ce genre. Les deux statues de héros de l’indépendance américaine, par M. Mac-Monnies, toutes deux destinées à des places de New-York, sont de simples figures de grandeur naturelle, mais exécutées avec une accentuation très simple et très grave du caractère des personnages. Le premier, Nathan Hale, exécuté par les Anglais, comme espion, en 1776, est représenté au moment du supplice, debout, les mains liées, lorsqu’il prononce ses dernières paroles : « Je regrette de n’avoir qu’une vie à donner à mon pays. » Le second, James S.-T. Stranahan, premier citoyen de Brooklyn-New-York, garde en effet tout l’air, dans son attitude de promeneur, d’un de ces bons et intelligens bourgeois dont Franklin est resté pour nous le type. Un autre Américain, un Canadien, M. Philippe Hébert, Français d’origine, nous offre une bonne effigie de Frontenac gouverneur français du Canada, en 1690. La sculpture de M. Hébert, comme celle de M. Mac-Monnies, a, d’ailleurs, une tournure absolument française.

Les quatre figures de M. Allar, pour la basilique en construction à Domrémy, composent un groupe remarquable. Néanmoins, on ne pourra porter sur l’ensemble un jugement définitif que lorsque ces figures seront en place, et exécutées dans la matière pour laquelle elles ont été préparées. Ces quatre statues, Jeanne d’Arc entendant les voix, saint Michel, sainte Catherine, sainte Marguerite, lui ordonnant de partir au secours de la France doivent être disposées sous le porche de l’église. L’artiste s’est donc trouvé, pour les réunir, en présence de difficultés singulières; d’une part, il fallait conserver à Jeanne d’Arc une place digne d’elle, ce qui excluait la possibilité de nous la faire voir de profil et encore moins de dos; d’autre part, il fallait assurer également aux trois saintes la position prépondérante qu’elles doivent tenir dans un édifice qui leur est consacré. M. Allar les a donc tous présentés de lace, Jeanne sur le premier plan, en bas, en avant, sa quenouille à la main, un genou en terre, se soulevant au murmure de ces voix