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LES
SALONS DE 1891

II.[1]
LA SCULPTURE ET l’ARCHITECTURE AU SALON DES CHAMPS-ELYSÉES.

L’âme des morts, cette année, plane sur le jardin des sculpteurs. Que de crêpes noirs suspendus aux socles de marbre ! que de vaillans ouvriers du ciseau, que de sincères amans de la vie et de la beauté ravis en quelques mois, la plupart avant l’heure, tous pleins encore de projets hardis ou de douces pensées! Et qu’ils étaient bien Français, tous ceux qui viennent de disparaître, Français par la loyauté du génie et par la simplicité du cœur. Français par le courage à la besogne et par la belle humeur affable et tendre, Aimé Millet, le plus ancien, que rendirent célèbres son Ariane et son Vercingétorix ; Charles Gauthier, l’auteur modeste et savant du Jeune Braconnier, tous deux professeurs aimés et respectés de plusieurs générations; Gautherin, frappé à quarante ans, si laborieux et si délicat, et mettant toute son âme à représenter les gloires des laborieux et les charmes des délicats, l’auteur du Travail du Diderot, de la Clotilde de Surville et de tant de bustes d’enfans exquis ; Delaplanche, le Parisien spirituel et héroïque , un de ces consciencieux travailleurs qui cachent sous un bon sourire

  1. Voyez la Revue du 1er juin.