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plusieurs jours de négociations, s’est chargé de la succession très embrouillée que lui léguait la précédente administration. Les nouveaux gouvernans vont avoir, pour première tâche, de faire agréer aux chambres l’arrangement conclu à Londres le 14 mai pour une nouvelle délimitation des possessions anglaises et portugaises dans le sud de l’Afrique. Un fâcheux incident s’est encore produit dans le Manicaland; mais il est admis de part et d’autre qu’il résulte d’un simple malentendu; il n’arrêtera donc pas la prompte ratification de l’arrangement.

Le conflit une fois réglé avec l’Angleterre, le cabinet devra aborder l’œuvre, beaucoup plus difficile, du relèvement du crédit, très ébranlé, du Portugal. Le ministère était à peine formé que le nouveau ministre des finances, M. Mariano Carvalho, est venu à Paris pour aplanir des dissentimens qui ont surgi entre le gouvernement portugais et le syndicat à propos de l’émission récente de l’emprunt des Tabacs, et aussi pour trouver les fonds nécessaires au paiement du coupon de la dette en juillet. La tenue de la rente du Portugal depuis l’arrivée de M. Carvalho donne à espérer qu’il mènera à bonne fin sa double mission.

L’Extérieure était tombée de 75 à 70 ; elle est maintenant à 72 1/2. Les Cortès discutent à Madrid les projets présentés par le ministre des finances, M. Cos-Guyon, pour l’extension à donner à la circulation fiduciaire de l’Espagne. Il était question d’abord d’une extension illimitée. Ce projet a rencontré dans tous les cercles financiers et dans les chambres de commerce une si vive opposition que M. Canovas a dû céder aux remontrances qui surgissaient de toutes parts. Le projet modifié comporte une élévation à 1,500 millions de pesetas du maximum d’émission des billets de banque. C’est déjà un très gros chiffre relativement à la rareté croissante du numéraire or en Espagne.

Les affaires vont infiniment mieux au point de vue financier dans le centre et dans l’est de l’Europe qu’au sud et au sud-ouest. La situation budgétaire de la Hongrie reste excellente, et il en est de même de celle du royaume cisleithan. Dans les deux pays le déficit a disparu, et des excédens de recettes commencent à se produire. Aussi les projets de régularisation de la valuta sont-ils de nouveau discutés ; la Hongrie est prête dès maintenant, l’Autriche le sera bientôt. Reprise d’une unité pleine sur le 4 pour 100 hongrois à 91 1/2.

Le gouvernement russe a renoncé à toute nouvelle opération de conversion en 1891. Son activité va se porter sur la mise en train d’une entreprise gigantesque, la construction du chemin de fer transsibérien qui doit relier le réseau russe par-dessus l’Oural, à Vladivostock sur l’Océan-Pacifique, par les villes d’Omsk, Tomsk, Irkoutsk et le lac Baïkal. La construction durera dix ou douze années ; les chantiers vont être ouverts cette année même, aux deux extrémités.