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cerveau de ce qui a lieu dans un autre cerveau. Enfin, ce qui se reproduit, c’est une idée-force, avec ses effets moteurs. L’hypnotiseur qui concentre fortement sa volonté sur l’idée d’endormir à distance une autre personne se met artificiellement lui-même dans un état de monoïdéisme, où tout est subordonné à une seule idée, devenue le centre actuel du cerveau et de ses mouvemens. D’autre part, on sait crue, chez le sujet hypnotisable, l’idée du sommeil voulu par l’hypnotiseur suffit pour réaliser le sommeil même. Il faut les deux idées à la fois pour produire le sommeil. Ces idées n’ont pas besoin d’être claires et distinctes quand le sujet est très impressionnable. Il suffit que le cerveau, par un moyen quelconque, reçoive les vibrations qui, d’ordinaire, aboutissent à l’idée du sommeil voulu par telle personne. Comme l’hypnose est précisément la dépression des élémens prédominans dans la conscience normale et l’exaltation d’élémens qui, d’ordinaire, sont effacés sous les autres, on comprend que l’effet, à distance, puisse et doive se produire dans les élémens subconsciens ou, en quelque sorte, dans le sous-sol de la conscience, qui est le siège même du sommeil hypnotique. En un mot, on peut admettre une certaine tension cérébrale, nerveuse et musculaire, capable de produire une orientation de la force nerveuse dans une seule direction et qui, par son intensité même, détermine des ondulations extérieures. Ces ondulations, rencontrant un cerveau d’un équilibre excessivement instable et habitué, sous leur influence, à tomber dans le sommeil, y produisent leur effet habituel malgré la distance. Faites résonner un diapason ; un autre diapason, à l’unisson du premier, se mettra à résonner. Les ondulations sonores du premier se sont donc reproduites dans le second, grâce au milieu aérien qui les a transmises.

Au témoignage de Gurney, le révérend Newmann adresse mentalement à sa femme une question ; sa femme, sans le voir, assise devant la planchette des médiums, écrit automatiquement, et répond à la question adressée sans avoir eu conscience ni de la demande, ni de la réponse. On peut donc encore supposer ici une transmission de la pensée, soit par des ondulations aériennes, soit par des ondulations nerveuses qui passent d’un cerveau à l’autre. En outre, cette transmission a lieu à la région subconsciente du cerveau, où se produit d’ordinaire le somnambulisme ; l’individu doué de l’écriture automatique (ou médium) est un hémi-somnambule ; il n’a qu’une subconscience de la question et de la réponse qu’il y fait : le dialogue a lieu au-dessous de la conscience claire du moi.

Nous entrons maintenant dans un domaine encore plus