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De 50 centimes et se tient à 93 francs. L’amortissable, plus fortement atteint par les réalisations, a perdu à peu près 75 centimes à 94.50.

Pour que nos fonds publics aient ainsi reculé, malgré les achats quotidiens de rente 3 0/0 opérés par la Caisse des dépôts et consignations avec les fonds des caisses d’épargne, il faut que le public capitaliste ait eu de sérieuses raisons, sinon pour appréhender un retour définitif des cours à un niveau plus bas, du moins une longue stagnation au niveau actuel.

Une de ces raisons est l’existence du stock énorme de rentes flottantes, créé par l’émission de notre emprunt national de 870 millions en janvier dernier. Cet emprunt n’est encore libéré que de 45 francs, soit de la moitié à peu près du prix entier de la rente. Le ministre n’a pas jusqu’ici usé de la faculté qu’il s’est réservée d’autoriser les libérations anticipées. Il reste donc à verser environ 450 millions de francs d’ici au mois de juillet 1892, soit plus de 30 millions par mois.

Cette raison expliquerait la stagnation, mais non le recul des cours. Il y faut joindre d’autres motifs, d’un caractère plus ou moins exceptionnel ou passager, l’influence des pertes énormes infligées au marché de Londres par la dépréciation continue des valeurs argentines, brésiliennes et chiliennes, la nécessité où s’est vue la Banque d’Angleterre de décréter une élévation du taux de l’escompte de 3 pour 100 à 3 1/2 pour 100, mesure qui devra, sans doute, être complétée à bref délai par une nouvelle élévation à 4 pour 100, enfin la campagne menée contre quelques-uns de nos établissemens de crédit par une spéculation baissière que la chute de la Société des dépôts et de comptes courans a tout à coup enhardie.

Le Crédit industriel a été d’abord attaqué très vivement, et ses actions ont reculé, dans une seule Bourse, de 630 à 570. La Société a répondu par une poursuite devant la justice correctionnelle et a obtenu contre les auteurs de l’attaque un jugement sévère. Les actionnaires, rassurés par cet acte d’énergie, ont arrêté leurs ventes, et l’action s’est relevée à 610. Il n’y a pas eu de retraits sérieux de dépôts au Crédit industriel. L’établissement avait d’ailleurs pris, au moyen d’un réescompte d’une partie de son portefeuille à la Banque de France, les mesures nécessaires pour donner satisfaction à toutes les demandes.

La spéculation s’en est prise ensuite aux actions de la Banque d’escompte et à diverses valeurs que l’on sait ou que l’on suppose graviter dans l’orbite de cet établissement. De 525 l’action de la Banque d’escompte a été précipitée brusquement en deux Bourses à 470 ; elle s’est relevée à 490. Les établissemens Decauville ont baissé de 450 à 385 et restent à 415. Les actions des Aciéries de France, malgré l’excellente situation industrielle de l’entreprise, affirmée par le conseil d’administration dans l’assemblée générale des actionnaires tenue le 25 courant,