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LES
JUIFS ET L'ANTISEMITISME

II.[1]
LE GRIEF NATIONAL. — LA RACE JUIVE ET L’ESPRIT DE TRIBU.

Après le grief religieux, le grief national. Ce que le juif semble mettre en péril, ce n’est pas seulement la religion et les bases traditionnelles de nos sociétés chrétiennes, c’est notre nationalité avec notre culture indigène et notre génie historique. Or, aux yeux des peuples modernes, pas de crime plus grand ; tout se pardonne, sauf cela : c’est le péché irrémissible.

Sous le juif, on a retrouvé le sémite, grave découverte pour les fils d’Abraham ! On ne s’en prend plus seulement à leur foi, mais au sang qui coule dans leurs veines. Le juif, dit-on, est un élément étranger, d’une race exotique ; il n’a rien de commun avec nous. Israël nous apparaît comme une tribu orientale disséminée au milieu des peuples modernes. S’ils n’ont plus à redouter le fanatisme religieux, les juifs ont vu se dresser contre eux quelque chose de non moins passionné et de non moins exclusif, les antipathies de races. Le XIXe siècle aura été dans l’histoire le siècle des nationalités. Le sentiment national, succédant brusquement

  1. Voyez la Revue du 15 février.