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gouvernement a pour eux moins d’importance que l’organisation économique.

Ici encore ils appliquent leur fatalisme historique, fala viam invenient. Qu’on se borne à remplir la tâche de chaque jour, qu’on laisse de côté les vagues déclarations de principes, qu’on s’en tienne aux exigences pratiques, réforme scolaire, extension du droit de coalition, d’association, impôt direct et progressif, suffrage universel étendu à la Prusse tel qu’il existe déjà pour l’empire. Quant à l’avenir, que les princes soient bons ou mauvais, favorables ou non, il n’importe guère. Les meilleurs césars n’ont pu empêcher l’empire romain de marcher à la décomposition et à la ruine…


III. — L’INTERNATIONALISME.

Le parti démocrate socialiste n’a pas seulement une politique intérieure, il a aussi une politique étrangère dont le caractère le plus saillant est l’internationalisme. Dans notre Europe, encore toute palpitante de la lutte et de la haine des nationalités, le socialisme forme une des trois grandes internationales, qui sont : la rouge, la noire et la dorée, celle des prolétaires, des jésuites, des banquiers. Le même phénomène général d’appauvrissement et d’enrichissement, conséquence du régime industriel, se traduit partout en opposition sociale des capitalistes et des prolétaires. Ce caractère international, si accusé lors de la formation du parti, s’est encore manifesté avec éclat au congrès marxiste de Paris, en 1889 : — « Il appartiendra enfin, disent les socialistes de Munich, dans leurs-instructions à Vollmar, leur délégué, en présence de continuelles menaces de guerre, des armemens gigantesques et des odieuses excitations nationales, de condamner hautement la politique d’alarme et de provocation qui a sa source dans l’intérêt dynastique et l’ambition nationale. » Bebel faisait ressortir de même dans un récent discours la contradiction des gouvernemens qui donnent un caractère national à toutes les questions, et les aspirations des peuples qui tendent à la paix et à la fraternité. Conflit a des masses contre les classes, » le socialisme exclut la lutte des nationalités. Nous avons vu, en 1870, Bebel et Liebknecht jeter à la face de leurs compatriotes, ivres de la victoire, la protestation de leurs principes contre l’annexion de l’Alsace-Lorraine et expier dans les forteresses prussiennes le courage de leurs opinions. Les journaux du parti en Allemagne suivent les intérêts du socialisme dans tous les pays du monde, une élection socialiste dans un département français est saluée à Berlin comme un succès pour le parti. Le congrès de Paris, le récent congrès des mineurs, auquel en