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pour deux et fit des dégâts pour quatre, car il brisa trois fioles renversa le vin et, après cela, vint souper où j’étais. Item au jour 7 de septembre, il vola un style de la valeur de 22 sous à Marc, qui était avec moi, et le lui prit dans son atelier; puis, lorsque ledit Marc s’en fut longuement enquis, il le trouva caché dans la caisse dudit Jacques. Livre, 1, sous de livre, 2. — Item, au jour 26 de janvier suivant, tandis que j’étais chez messire Galéaz de Sanseverino à ordonner la fête de sa joute, et que quelques estaffiers se déshabillaient pour essayer des vêtemens d’hommes sauvages devant figurer dans cette fête, Jacques s’approcha de l’escarcelle de l’un d’eux, qui était sur le lit avec d’autres effets, et prit quelques deniers qu’il y trouva. Livres : 2, sous de livre : 4. — Item, une peau turque m’ayant été donnée en ladite maison par maître Augustin de Pavie, pour faire une paire de bottines, ce Jacques me la vola dans le mois et la vendit à un savetier pour 20 sous ; et de ces deniers, selon ce que lui-même me confessa, il acheta des sucreries d’anis. Livres, 2. — Item encore au jour 2 d’avril, Jean-Antoine laissant un style d’argent sur un de ses dessins, ce Jacques le lui vola, et il était de la valeur de 24 sous. Livre, 1 ; sous de livre, 4[1]. »


On s’accorde à considérer les manuscrits de Léonard comme des fragmens de l’enseignement qu’il donna devant cette académie véritablement encyclopédique. Nous devons donc passer en revue les différentes disciplines représentées dans un programme presque aussi vaste que celui-ci de Pic de La Mirandole, car il embrassait toutes les connaissances humaines, sans en excepter les sciences occultes.

Commençons par les belles-lettres. Léonard ne semble pas avoir entretenu de relations suivies avec les humanistes ou les poètes, comme Michel-Ange et Raphaël : ce fut de sa part un oubli, qu’il paya chèrement. Aucun artiste n’obtint moins d’éloges des sonneurs de louanges. Il n’était cependant nullement étranger aux choses de la littérature (quoique le fameux sonnet qu’on lui attribue ne soit pas de lui, comme M. Uzielli l’a prouvé) ; ses lectures, ses extraits en font foi. A un moment donné, il éprouva le besoin de combler une lacune de son éducation première ; il lui pesait, au milieu d’une cour si lettrée, d’ignorer le latin. Il se mit donc bravement à l’œuvre et, en vérité, il avait fort à faire, car si nous en jugeons par le glossaire latin-italien qu’il rédigea pour son usage personnel, et dans lequel il fit figurer des mots aussi élémentaires que sed aliquid, quid, instar, tune, prœter, etc., il n’était même

  1. Charles Ravaisson-Mollien, les Manuscrits de Léonard de Vinci, t. III. fol. 15.