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Cet état de vassalité relativement à l’Assyrie avait d’ailleurs pour Ézéchias de réels avantages. L’Assyrie ne paraît pas avoir visé à des délimitations bien exactes de frontières. Plusieurs villes de l’ancien royaume d’Israël purent être rattachées à Juda. Du côté des Philistins, les armes d’Ézéchias furent tout à fait victorieuses. Le pays, sans doute épuisé par ses luttes contre l’Assyrie, tomba, jusqu’à son extrémité méridionale, c’est-à-dire jusqu’à Gaza, entre les mains du roi de Juda.

L’organisation de la royauté paraît s’être retrouvée, dans les bonnes années d’Ézéchias, ce qu’elle fut aux meilleures époques de la dynastie davidique. Le roi est entouré de soferim, constituant une sorte de classe administrative, et de sokenim, ministres et conseillers. Le préfet du palais ou majordome est le premier soken, une sorte de vizir. Cette place, comme nous l’avons vu à propos de Sebna et d’Éliaqim, donnait un grand pouvoir et était l’objet de vives compétitions. Les prêtres apparaissent tout à fait subordonnés et réduits au service du temple. Les prophètes étaient tout ; ils avaient bénéficié de ce que l’ordre civil avait perdu par les victoires de l’Assyrie.

Les travaux publics de Jérusalem, qui paraissent avoir été actifs sous Achaz, le furent plus encore sous Ézéchias. Une vraie transformation de la ville s’opéra. La population s’augmentait beaucoup ; il est probable que beaucoup d’Israélites, sans patrie depuis la fin du royaume du Nord, vinrent s’y fixer.

L’approvisionnement d’eau a toujours été la grande difficulté de Jérusalem, la ville étant assise tout près de la ligne culminante entre la Méditerranée et la Mer-Morte, et n’étant dominée que par quelques sommets très éloignés. La population hiérosolymite a toujours vécu de ses citernes, qui sont en grand nombre et bien exécutées. La petite source de Gihon, sur le versant de Sion, n’a qu’un mince filet d’eau. Les eaux recueillies à la naissance de la vallée occidentale sont peu de chose, et proviennent uniquement des terrains environnans, servant pendant l’hiver de surfaces récoltantes. Ézéchias entreprit de tirer le meilleur parti possible de cette pauvreté[1], et en même temps de prendre les précautions nécessaires pour qu’en cas de siège, la ville ne pût être coupée de sa provision d’eau. Il fit construire dans la ville une grande piscine[2] et

  1. Les vasques d’Étham ont sûrement été faites pour l’approvisionnement de la cité. Il n’en est jamais question dans les textes bibliques. Ce beau travail, qui n’a qu’un défaut, c’est de supposer une police exacte établie dans le pays, paraît être l’ouvrage de Pilate (Jos., B. J., III, IX, 4).
  2. II Rois, XX, 20. C’est probablement Amygdalon ou Birket Hammâm-el-Batrak. Si cette piscine de II Rois, XX, 20, est la même que la Vieille piscine d’Isaïe, XXII, 11, il faudrait supposer qu’Ézéchias ne fit que mettre en état un travail plus ancien. La circonstance « entre deux murailles » (Isaïe, l. c.) conviendrait bien à cet emplacement, qu’Ézéchias put couvrir d’un second mur.