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« assurer aux administrés l’impartialité dans la répartition de l’impôt et la vérification de l’emploi des deniers levés pour le paiement des dépenses locales. » Ils doivent en outre, avec discrétion et modestie, « procurer au gouvernement des lumières qui, seules, peuvent le mettre à même de fournir aux besoins de chaque département et d’améliorer l’ensemble de l’administration publique. »


VIII

Tel est l’esprit de l’institution et telle en est la forme. Après 1814 et 1815, après la chute de l’Empire et la Restauration, l’institution subsiste et demeure telle qu’auparavant, dans sa forme et dans son esprit : c’est toujours le gouvernement qui nomme et dirige tous les représentans de la société locale, au département, à la commune et dans les circonscriptions interposées, préfet, sous-préfets, maires et adjoints, conseillers du département, de l’arrondissement et de la commune. Quel que soit le pouvoir régnant, il répugne à s’amoindrir ; jamais il ne restreint de lui-même sa faculté de conférer ou de retirer les places, l’autorité, la considération, l’influence, les appointemens, toutes les bonnes choses désirables et désirées ; autant qu’il peut, il les garde dans ses mains pour les distribuer à son gré et dans son intérêt, pour en gratifier ses partisans et en priver ses adversaires, pour s’attirer des cliens et se faire des créatures. Les 4,000 places de préfets, sous-préfets, conseillers de préfecture, de département et d’arrondissement, les 400,000 places de maires, adjoints et conseillers municipaux, outre cela, les innombrables emplois salariés des agens auxiliaires ou secondaires, depuis le secrétaire-général de la préfecture jusqu’au secrétaire de la mairie, depuis les scribes et commis de la préfecture et de la sous-préfecture jusqu’au personnel de la police municipale et de l’octroi dans les villes, depuis l’ingénieur et l’architecte de la ville et du département jusqu’au dernier agent-voyer, depuis les gardiens et surveillans d’une écluse ou d’un port jusqu’aux cantonniers et aux gardes champêtres, directement ou indirectement, le gouvernement constitutionnel en dispose de la même façon que le gouvernement impérial, avec la même ingérence dans les plus minces détails de la plus mince affaire. Commune ou département, chaque société locale reste sous le second régime ce qu’elle était sous le premier, un prolongement de la société centrale, un appendice de l’État, une succursale de la grande maison dont le siège est à Paris. Dans ces succursales dirigées d’en haut, rien n’est changé, ni l’étendue et les limites de la circonscription, ni la provenance et la hiérarchie des pouvoirs, ni le cadre