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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars.

Ce premier mois de printemps, mais souvent redouté pour la paix de l’Europe, est décidément, cette année, fertile en curieux et intéressans spectacles. Il nous montre les affaires humaines, les jeux de la politique dans leur infinie diversité. Rarement on a vu, à un si court intervalle, en si peu de jours, se succéder, se presser et se confondre tant d’événemens, de surprises, de coups de théâtre, de changemens à vue sur cette scène pourtant si mobile de notre monde contemporain. Songez donc ! Une crise ministérielle, à la vérité peu émouvante, en France, une crise profonde de gouvernement à Berlin, l’éclipse soudaine d’un homme qui, depuis un quart de siècle, a passé pour l’arbitre des nations, les agitations d’un jeune prince, remuant son empire et le monde d’une main impatiente, évoquant en même temps autour de lui les plus redoutables problèmes de la société européenne, le drame et la comédie, tout s’est réuni. Tout concourt, assurément, à créer une situation des plus extraordinaires. On ne sait pas, par exemple, on ne peut pas même prévoir ce qui sortira de cet ensemble de choses, ce qui en résultera pour la paix sociale et politique des peuples, où tout cela conduira. Ce qui est certain, c’est que les événemens vont vite, se poussant les uns les autres, et que, devant ces spectacles nouveaux qui se succèdent depuis quelques jours, il y a eu, il y a encore une assez indéfinissable impression d’étonnement et d’attente. On s’intéresse à tout ce qui arrive, à tout ce qu’on voit, sans être toujours bien sûr de le comprendre. On sent un peu qu’on va vers l’inconnu et qu’on ne peut néanmoins s’arrêter.

Il faut marcher et agir ! il faut suivre le mouvement, et la première condition d’une marche plus assurée, pour une nation comme la France, serait peut-être de commencer par avoir un gouvernement pour la