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n’occuperait que 6,714,000 acres ou environ 3 millions d’hectares ; l’étendue des autres terres en culture atteindrait seulement 4 millions 812,000 acres, à peu près 2 millions d’hectares. Contrairement à l’opinion, dit M. Yeijiro Ono, qu’il n’y a pas un pouce de sol au Japon qui ne soit utilisé, on constate que la culture n’occupe qu’une petite partie du territoire. La valeur de l’acre de terre à riz monte, en moyenne, à 180 yens, soit environ 900 francs, ou un peu plus de 2,200 francs l’hectare ; celle des autres terres cultivées ne dépasse pas moyennement 55 yens 20 sens, ou 700 francs approximativement l’hectare. Les forêts et les terres incultes ne valent que 1 yen 20 sens l’acre, soit l’hectare une douzaine de francs. Les vastes étendues de terres en dehors de la culture et l’énormité des taxes expliquent la valeur restreinte du sol.

Pour qu’une population si nombreuse vive sur cinq millions environ d’hectares en culture, il faut une production relativement abondante de chaque parcelle, ensuite une sobriété assez remarquable des habitans : on doit ajouter que, les animaux de travail étant peu nombreux, et de même ceux de boucherie, presque tout ce sol cultivé l’est directement pour la nourriture de l’homme. Il n’est pas rare qu’il produise deux récoltes par an : c’est le cas général dans les deux îles méridionales, Kiushiu et Shikoku, et dans les parties moyennes et côtières de la principale île, Hondo. Voici, dans ce cas, l’assolement : on plante le riz à la fin de mai ou en juin ; on le recueille au début de l’automne ; la terre se repose jusqu’au commencement de l’hiver ; on y sème alors du blé ou de l’orge, qui est mûre vers le milieu du printemps. Un tiers environ des terres cultivées appartient, d’après M. Yeijiro Ono, à cette classe si favorisée. Quelques cultivateurs trouvent même le moyen d’intercaler entre ce riz et cette orge une troisième récolte de légumes, notamment de fèves.

La terre japonaise, sur ces étendues restreintes de culture, produit ainsi 186 millions approximativement de boisseaux (51 millions d’hectolitres) de riz, 64 millions de boisseaux (17 millions et demi d’hectolitres) de deux variétés différentes d’orge, 16 millions de boisseaux (4,400,000 hectolitres) de froment ; enfin, 12 millions de boisseaux (3,350,000 hectolitres) de fèves. On n’arrive ainsi qu’à un ensemble de 76 millions environ d’hectolitres de nourriture végétale. Cela semble bien peu à côté des 110 millions d’hectolitres de notre récolte moyenne de blé, auxquels se joignent approximativement 17 millions d’hectolitres de seigle, en laissant de côté l’orge, qui, en France, est accessoire. Or la population du Japon est presque exactement égale, peut-être même un peu supérieure, à celle de la France ; mais outre que le riz contient