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non encore réalisée, en vue d’alimenter le budget extraordinaire de la guerre, elles seront remplacées par une création de rente 3 0/0 perpétuelle pour un montant de 700 millions de francs. Les obligations sexennaires émises et à convertir représentent à peu près la moitié de cette somme. C’est donc à moins de 400 millions que s’élève le chiffre de l’appel direct fait à l’épargne française.

On avait pensé d’abord que l’opération projetée porterait sur un chiffre beaucoup plus élevé. On parlait d’un grand emprunt de liquidation qui aurait consolidé tous les arriérés, tous les engagemens du trésor et donné à nos finances, entièrement reconstituées, un point de départ nouveau.

Sur cette perspective d’un emprunt de 1,200 millions de francs, — tel était le chiffre présumé, — une partie de la spéculation avait, au début du mois, vendu des rentes à découvert. Mal lui en a pris. Aussitôt qu’ont été connues les propositions ministérielles, le 3 pour 100 s’est raffermi, reprenant d’abord lentement de 87.75 à 88 francs, puis dépassant largement ce niveau. La veille de la réponse des primes, et les rachats du découvert aidant, — la rente a atteint 8840, le plus haut prix où on l’ait vue, et n’a reperdu ensuite que quelques centimes. L’abaissement du taux de l’escompte sur les places de Vienne, de Berlin, de Bruxelles et de Londres a fait supposer que les taux de report seraient très modérés à la liquidation de fin février ; les acheteurs se montrent très confians.

Pendant quelques jours, les marchés étrangers n’ont pas paru disposés à suivre le nôtre dans cette voie de hausse. A Londres, une réaction très vive s’est produite sur les titres de nombreuses sociétés de mines d’or et sur ceux de la compagnie de diamans de Beers. A Berlin, les cours d’un grand nombre de valeurs minières et métallurgiques n’ont pas été mieux traités. On avait commis bien des exagérations de hausse, sur la foi d’une élévation considérable du prix du fer et sur un développement remarquable d’activité dans la plupart des industries. Lorsque la hausse s’est enfin arrêtée et que les acheteurs voulurent commencer à réaliser, il y eut une sorte d’effondrement et les pertes ont été considérables. Les banques locales n’ont pas été indemnes de tout dommage ; pendant plusieurs jours la place berlinoise a paru désorientée. Mais le calme s’est rétabli, et la spéculation, dégagée du poids d’engagemens inconsidérés en valeurs de mines, a supporté avec impassibilité l’impression produite par les succès des socialistes en Allemagne dans les élections qui viennent d’avoir lieu pour le Reichstag.

A Vienne, l’optimisme est resté à l’ordre du jour. Les valeurs locales, chemins de fer, banques et titres industriels, sont en hausse. La publication, toujours impatiemment attendue, du bilan semestriel de la Creditanstalt de Vienne a produit une très bonne impression. Les