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Cette révolution, bientôt confirmée avec tant d’éclat par les découvertes et les doctrines de Pasteur, appelait, sous peine de déchéance, une transformation dans les méthodes et dans le contenu de l’enseignement. Il n’était plus possible de borner l’éducation, même l’éducation professionnelle du futur médecin, à l’anatomie, aux trois cliniques, à la médecine opératoire et à la thérapeutique. Il fallait envelopper toutes ces études, autrefois indépendantes, d’un milieu de science pure. À la clinique et à l’observation proprement dite, il fallait ajouter le laboratoire et l’expérience. C’est ce qu’ont fait les nouveaux règlemens du doctorat en médecine. On y a conservé toutes les anciennes études, celles qui font le praticien. On y a ajouté celles qui font le savant, l’histologie normale et l’histologie pathologique, la physique et la chimie, l’étude de l’organisme à l’état sain et l’étude expérimentale de ses altérations. Dans les hôpitaux, partout les salles d’examen clinique se sont flanquées de laboratoires ; dans les facultés, partout autour des salles de dissection et de médecine opératoire, se sont ouvertes d’autres salles pour d’autres travaux pratiques, travaux de chimie, travaux de physique, travaux de physiologie, travaux d’histologie, travaux d’anatomie pathologique, travaux de bactériologie, travaux de thérapeutique expérimentale. L’enseignement, qui naguère encore se donnait tout entier dans la chaire et au lit du malade, a maintenant un troisième siège, le laboratoire, et ce n’est pas là qu’il est le moins actif. Il ne suffit plus à l’étudiant en médecine de savoir manier le bistouri, le scalpel et le stéthoscope. Le microscope, les réactifs, les bouillons de culture sont devenus pour lui choses d’usage courant et de première nécessité.

Il y avait aussi bien des ouvertures à pratiquer dans les facultés de droit. Elles étaient closes de toutes parts, sauf du côté du barreau et de la magistrature. C’étaient des écoles, mais des écoles qui tenaient un peu du sanctuaire. On y interprétait la loi écrite ; mais on y croyait aussi avoir charge de la garder, et la façon même dont on l’interprétait témoignait de cette préoccupation. C’était toujours, en effet, la façon des géomètres, qui partent de principes immuables et en déroulent les conséquences, et non celle des historiens pour qui la loi sort des faits, s’explique par un ensemble donné de faits et se modifie avec les faits. La critique historique, avec ses investigations, ses inductions, ses hardiesses, ses incertitudes, ses hypothèses, son mouvement et sa vie, n’y pénétrait pas. La faute n’en était pas aux facultés, mais à leurs origines. Elles n’étaient pas, en effet, ce que la Révolution avait rêvé qu’elles tussent, des écoles de sciences sociales et politiques, où à côté du droit proprement dit eût trouvé place tout ce qui a