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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 janvier.

Que faut-il de plus, direz-vous, pour que les affaires de la France marchent tout simplement, régulièrement ? Il y a eu, voici quelques mois à peine, des élections qui ont eu ce résultat heureux de chasser les dangers et les fantômes dont on s’était un moment effrayé. Il y a dans les chambres nouvelles une majorité pour soutenir la république, la constitution et le gouvernement. Il y a un ministère qu’on ne tourmente certes pas, qui a la liberté de vivre, même sans rien faire. Il y a surtout un pays qui n’est pas difficile, qui, une fois rentré dans son calme après la fièvre des élections, attend avec patience et bonne volonté ce qu’on fera pour lui. Que faut-il de plus pour durer, pour courir tant bien que mal l’étape nouvelle de quatre ans ?

Eh bien ! oui, il y a toutes les apparences d’un état régulier, d’une marche régulière des choses, — et il n’y a pas la réalité. Il y a des majorités mobiles et versatiles qui se retrouvent par instant dans des votes de violence, de représaille et de parti, — il n’y a pas, du moins encore, une vraie majorité liée par un sentiment commun des intérêts et des vœux du pays. Il y a un ministère qui gère les affaires en évitant de se compromettre, sans vivre ni mourir, — il n’y a pas un gouvernement réglant la marche, donnant une impulsion, ayant une volonté pour tous ceux qui n’en ont pas. On sent que dans cet ensemble de notre vie publique du moment, il n’y a ni fixité, ni esprit d’initiative, ni direction. Il n’y a que des instincts, des contradictions, des velléités, une incertitude qui se prolonge un peu dans tous les camps et sous toutes les formes. C’est une majorité qui se cherche, disait-on récemment au Palais-Bourbon. On peut bien ajouter si l’on veut, pour être dans une vérité complète, que sous ce rapport la minorité, l’opposition n’est pas plus avancée, qu’elle en est à se chercher. Ni