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d’abuser, — certains édicules spéciaux, que je n’ai pas à décrire, des lavabos bien pourvus d’instrumens de propreté, promettent enfin une réaction bienfaisante contre la saleté repoussante des maisons d’instruction où l’on élevait « les fils de famille » au temps de mon enfance. On n’a pas oublié les bains froids qui sont un des divertissemens les plus vifs des écoliers, auxquels ils apportent la santé. Dans un jardin en contrebas, disposé sur un terrain plan, on a dérivé un petit ruisseau que l’on a déversé dans une piscine carrée, de dimensions considérables, ouverte au soleil qui la chauffe, divisée en deux parties, l’une profonde pour les élèves sachant nager, l’autre donnant pied à ceux que leur ignorance de la natation réduit aux délices du barbotage.

Nulle maison d’éducation, parmi celles que j’ai visitées, ne m’a semblé placée dans des conditions plus salubres, et mieux appropriée aux exigences sanitaires de l’enfance. Située sur une hauteur, orientée au sud-est, protégée contre le vent du nord par une forêt qui la touche et lui verse un air purifié, elle offre le double avantage d’être à la campagne et d’être si voisine de Paris, qu’elle en peut facilement tirer ses ressources. Ces conditions, qui semblent créées précisément pour être propices aux écoliers, je voudrais les voir recherchées par les pensionnats, par les lycées, auxquels, bien souvent, on devrait les imposer. La multiplicité des communications rapides, par les voies ferrées, par les tramways, par les omnibus, permet aujourd’hui de libérer l’enfance, de l’enlever à l’agglomération inhumaine d’une population de plus de deux millions d’habitans, de lui donner l’air, l’espace, la verdure, qui lui sont indispensables, surtout aux heures périlleuses de la puberté, et de la faire sortir de ces mornes maisons, moitié couvent, moitié caserne, où elle s’étiole, sans profit pour son intelligence et au détriment de sa force corporelle. Je sais que cela ne satisferait point le monde de la pédagogie, mais on en serait quitte pour lui faire remarquer que les établissemens scolaires sont créés pour les élèves et non point pour les professeurs.

L’école de Saint-Cyr est bien placée là où elle est, et nos lycées seront en bon lieu, si on les fait sortir de Paris. Puisque la France se dépeuple, on ne saurait trop redoubler de soins en faveur de l’enfance, surtout si l’on considère que, par suite de causes souvent peu honorables, presque toujours futiles, les parens comptent sur l’internat pour se débarrasser de leurs devoirs. Pendant que « le petit » est au collège, « madame » va à l’Opéra, « monsieur » va à son club, et les domestiques vont au cabaret. C’est bénéfice pour tout le monde, excepté pour l’enfant.

L’enseignement distribué aux écoliers par les frères de la