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s’est, avant tout, préoccupé des principes les plus féconds de l’hygiène. On sait d’avance que ceux qui sont venus là chercher leur dernier refuge ont l’espace sans lequel les maisons hospitalières, si souvent encombrées, ne sont que des prisons où la vie en commun, trop pressée, sans isolement possible, n’apporte pas le repos auquel on aspirait. L’hospice Ferrari est l’œuvre de M. Ginain, de l’Institut ; on ne saurait trop l’en louer.

Tout est de dimensions très vastes dans cette maison ; je le dis une fois pour toutes, afin de n’avoir plus à y revenir. Elle est destinée à recevoir cent vieillards, cinquante femmes, cinquante hommes, et à les hospitaliser jusqu’à la dernière heure. S’il en est là quelques-uns ou quelques-unes qui aient traversé les agglomérations de Bicêtre et de la Salpêtrière, ils doivent bénir la duchesse de Galliera et l’architecte qui a si bien compris ses intentions. D’un coup d’œil on embrasse l’ordonnance de l’édifice : un bâtiment réservé aux services généraux prend jour sur la place de Clamart ; à droite et à gauche, une aile très allongée qui ressemble à une galerie ; celle de droite appartient aux femmes, celle de gauche est attribuée aux hommes ; entre les deux, verdoie un jardin qu’une grille, à hauteur d’appui, sépare en parties égales. Au moindre rayon de soleil, tout s’éclaire et semble sourire. Ce n’est pas peu de chose, pour ceux que l’existence a harassés, de vivre dans un milieu qui n’est ni renfrogné ni morose, où la lumière se joue sur les murailles blanches, où les fleurs s’épanouissent, où le bruissement des grands arbres semble parler des souvenirs d’autrefois. La plante humaine, surtout lorsqu’elle fléchit déjà sous le poids des années, s’étiole dans les habitations sombres et froides ; elle se replie sur elle-même, contemple sa décrépitude et se désespère. Pour les vieillards, la clarté est une distraction, le soleil est une joie, la chaleur est un bienfait. On ne les leur a pas ménagés, et c’est ce qui donne à cette maison je ne sais quoi de bienveillant qui invite à entrer et engage à ne plus sortir. J’y insiste, car j’ai été fortement impressionné. Je voudrais que la commission des logemens insalubres vînt étudier cet hospice, afin d’en recommander l’aménagement aux futurs asiles que l’on ouvrira à la vieillesse.

Après avoir franchi la cour, où s’élève un pavillon destiné au portier, on pénètre dans un vestibule tel qu’en temps de pluie tous les pensionnaires pourraient s’y promener à l’aise. Il donne accès à un escalier qui n’affecte, selon la mode d’aujourd’hui, aucune apparence monumentale ; il est ce qu’il doit être, large, muni de rampes solides et de degrés faciles à franchir ; il ne faut pas que les pauvres vieux soient obligés de trop lever les jambes. Dans un atelier bien organisé tout doit être combiné pour faciliter le travail de l’ouvrier ; dans un hospice, conçu avec intelligence et bonté,