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fond en comble l’administration, on s’est ému ; et chacun de suggérer un remède, de proposer des mesures, de demander la suppression de la maxime odieuse proclamée en 1829 par la démocratie triomphante : les dépouilles aux vainqueurs, spoils to the victors ; Remède efficace, dont le parti vaincu réclame invariablement l’application et dont le parti au pouvoir ajourne, non moins invariablement, l’exécution au lendemain de sa défaite. L’excès du mal triomphera-t-il enfin de ces hésitations intéressées ? On en peut douter encore. En présence des périls qu’il fait courir à la grande république, on ne saurait que déplorer de voir les mœurs politiques favoriser le recrutement d’une armée de parasites montant la garde aux avenues du pouvoir, n’en ouvrant les portes qu’à ceux résignés à payer grassement son concours.


I

James G. Blaine naquit, en 1830, dans le comté de Washington, état de Pensylvanie. Élevé au collège local, il y brilla d’un certain éclat, en sortit avec honneur, émigra dans le Maine et débuta dans le journalisme comme collaborateur du Kennedec Journal, puis du Portland Advertiser. La politique l’attirait, et, dès 1862, il entrait à la chambre des représentans. Réélu six fois de suite, il y siégea jusqu’en 1867. Au début de la guerre de sécession, il prit nettement position dans les rangs du parti républicain, qui l’en récompensa en le nommant, en 1869, président du congrès. Élu sénateur du Maine en 1877, il intervint activement dans la lutte présidentielle de 1880 et contribua efficacement à l’élection de James A. Garfield, vigoureusement combattu par Winfield S. Hancock, candidat du parti démocratique, qui ne fut battu que par une majorité de 7,000 voix sur un total de 9 millions. Habilement travaillé par Blaine, l’état du Maine, dont le vote semblait douteux, se déclara pour Garfield, par une majorité de 8,868, et décida du succès. Dans cette campagne difficile, M. Blaine se révéla comme un tacticien consommé, et le nouveau président, reconnaissant de ses services, l’appela au pouvoir le 5 mars 1881, en qualité de secrétaire d’état. Il touchait au but de son ambition, mais, en septembre de la même année, James A. Garfield mourait assassiné par un solliciteur désappointé. Le vice-président Arthur lui succédait, et F. -T. Frelinghuysen remplaçait Blaine, dont les fonctions avaient duré dix mois à peine.

En 1884, le parti démocratique, battu à une faible majorité en 1880, rentrait en lice et portait comme candidat à la présidence Grover Clevoland. De son côté, le parti républicain faisait choix de M. Blaine pour le représenter. Contre son gré l’union s’était faite