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qui ont pesé depuis deux ans sur le commerce des deux pays. Le roi Humbert en avait déjà parlé dans son discours à l’ouverture de la session. La mesure a été proposée, elle a été rapidement votée, et dans les débats qui ont précédé le vote, on ne peut que constater un ton général de mesure et de conciliation à l’égard de la France. M. le président du conseil aussi a même déclaré que, s’il eût été au pouvoir, il n’eût pas sans doute dénoncé le traité de commerce, et il n’a pas caché son désir d’entrer dans des relations meilleures avec notre pays. C’est fort bien ! Seulement, il ne faut pas se payer de mots.

Au fond, dans cette affaire des relations de l’Italie et de la France, il y a deux questions. Il y a une question spéciale, que l’abolition des droits différentiels ne tranche pas. Derrière les tarifs différentiels il y a le tarif général, conçu, imaginé, voté d’avance justement pour cette guerre économique si tristement engagée depuis quelques années. Si, par l’abolition d’un tarif de circonstance, on n’a voulu que faire une démonstration, se donner de belles apparences devant l’Europe, cela ne sert à rien et n’abuse personne. Si l’on veut réellement entrer dans de meilleures relations de commerce, c’est le tarif général qui est la vraie difficulté à aborder. Jusque-là la France n’a rien à dire et ne peut qu’attendre. Pour ce qui est de la question bien autrement grave des rapports politiques des deux pays, la France a encore moins à prendre une initiative. Le malheur de l’Italie est de s’être laissé placer dans cette étrange position où elle peut être entraînée à employer ses forces contre la France, sans griefs, sans nécessité, de même d’ailleurs qu’elle peut être exposée à prendre les armes contre la Russie sans plus de raison. Bref, elle s’est laissé engager pour d’autres, et si elle y tient, c’est son affaire. Tant que cette situation subsistera, la France n’a qu’à rester dans l’expectative réservée et vigilante dont on lui a fait une loi. La France n’a ni à désavouer les sympathies dont elle a donné plus d’une fois les témoignages efficaces à l’Italie, ni à se refusera rien, ni à être dupe de vaines paroles.

C’est bien certain, l’activité humaine ne cesse de se déployer sous une forme ou sous l’autre dans l’univers, jusqu’aux extrémités les plus reculées du globe, là même où on ne l’aperçoit pas. Elle ne s’interrompt jamais ; elle peut tout au plus se ralentir dans certaines périodes comme celle-ci : c’est ce que les Américains appellent les années secondaires. On ne peut en disconvenir, cette année qui finit n’aura compté rien d’éclatant, rien d’exceptionnel dans le nouveau monde, et cette révolution même qui s’est accomplie au Brésil, qui a transformé d’un seul coup un empire en république, ne semble guère de nature à faire figure dans l’histoire. Le malheur est qu’on commence à voir clair sur ce coup de théâtre de Rio-de-Janeiro, qui a chassé un empereur et élevé un pouvoir nouveau.

Ce serait évidemment une assez puérile illusion d’attacher une im-