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distingué, Reinwardt, professeur à l’athénée d’Amsterdam, afin d’asseoir sur des bases solides l’étude de la merveilleuse nature qui fait la richesse des possessions néerlandaises, dans le sud de l’Asie.

L’escadre ne pénétra dans le détroit de la Sonde que vers la fin d’avril de l’année suivante. Il dut tarder aux hauts fonctionnaires, voguant, après une longue traversée, entre de charmans îlots enchâssés comme autant d’émeraudes dans les minces filets argentés des brisans, respirant les senteurs légères, émanées des côtes voisines, d’atterrir enfin et de s’acquitter de leur tâche. L’avenir, pourtant, leur réservait maints déboires, et ce ne fut qu’après de longues tergiversations que les autorités anglaises se décidèrent enfin, le 19 août 1816, à transmettre le pouvoir sur les Indes néerlandaises aux plénipotentiaires du souverain hollandais. Celui des commissaires destiné à remplir les fonctions de gouverneur-général, le baron van der Capellen, s’installa peu après à Buitenzorg, emmenant Reinwardt avec lui.

Buitenzorg, résidence des vice-rois des Indes néerlandaises, est situé à 58 kilomètres de Batavia, par 106° 53’ 5’’ de longitude est et 6° 35’ 8’’ de latitude sud, sur une des longues arêtes qui descendent vers le nord de la grande montagne le Salak. Site enchanteur, jouissant d’un beau et sain climat, il n’est pas étonnant que les gouverneurs-généraux s’y soient établis plutôt qu’à Batavia, quelque grande et belle que soit la « cité des villas. » Cette préférence accordée à Buitenzorg par les représentans du roi a été la cause de la création d’un établissement botanique sur ce point. En effet, sur les instances de Reinwardt, les commissaires-généraux décidèrent, par arrêté du 15 avril 1817, de fonder un jardin botanique à Buitenzorg, sur un terrain inculte appartenant au domaine et cédé par le baron van der Capellen. C’est sur ce terrain, contigu au parc et au jardin du palais, que les travaux commencèrent, le 18 mai, avec une cinquantaine d’ouvriers indigènes, sous la direction de deux jardiniers en chef, dont l’un, amené par Reinwardt, avait exercé le même emploi en Hollande, tandis que l’autre était élève du jardin royal de Kew. Il eût été difficile de trouver, dans toute l’île de Java, un endroit mieux approprié à une création de ce genre, parce que, grâce à des circonstances particulières, Buitenzorg réunit à d’autres avantages encore celui de ne pas avoir de mousson sèche proprement dite.

Il est évident qu’une période de sécheresse presque continue, de quatre à cinq mois, habituelle, par exemple, dans l’est de Java, ne saurait convenir qu’à un nombre de végétaux relativement restreint. Même le climat de Batavia, où deux ou trois mois privés de