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ses débauches. Là-dessus, Guy-Patin ne manquait pas de faire le moraliste. « On s’est de tout temps, disait-il pour conclure, moqué de la fortune sans vertu ; on se moque déjà de celui-ci, qui est haï de bien du monde, hormis des partisans et des jésuites, gens de bien et d’honneur. »

Au mois de janvier 1661, Mazarin s’était fait porter au château de Vincennes, au bois de Vincennes, comme on disait alors. Le 3 mars, il fit au roi une donation de ses biens que le roi refusa d’accepter. Le 7, le roi présent, il envoya chercher les trois principaux ministres, Le Tellier, de Lionne, Foucquet, et il fit au maître leur éloge. Il s’étendit particulièrement sur Foucquet, disant qu’il connaissait bien la justice et les finances, et qu’il pouvait être très utilement consulté sur toutes les autres affaires de l’état, de quelque nature qu’elles fussent. Fut-ce ce jour-là, ou la veille, ou le lendemain ? Toujours est-il que, démentant ces louanges, il dit ou fit savoir à Louis XIV, au sujet du surintendant, sa véritable opinion qui était tout le contraire. Ayant ainsi menti, d’une manière ou de l’autre, il mourut le 8 mars 1661, dans la nuit.

Foucquet sortait de sa maison de Saint-Mandé quand le jeune Brienne, qu’il rencontra dans le bois, lui apprit la grande nouvelle. Comment ses avertisseurs ordinaires ne la lui avaient-ils pas déjà donnée ? « Eh quoi ! s’écria-t-il ; le cardinal est donc mort ? Je ne sais plus à qui me fier ; les gens ne font jamais les choses qu’à demi. Ah ! que cela est fâcheux ! Le roi m’attend, et je devrois estre là des premiers. Mon Dieu ! monsieur de Brienne, dites-moi ce qui s’est passé, afin que je ne fasse pas de fautes par ignorance. » Quand il arriva, le roi était déjà en conseil avec de Lionne et Le Tellier. Le lendemain matin, il y eut une séance plus large où siégeaient, avec les trois principaux ministres, le chancelier Séguier, les deux Brienne, Du Plessis-Guenégaud et La Vrillière. Ce fut là que, s’adressant au chancelier, Louis XIV fit connaître à tous sa volonté royale : « Monsieur, je vous ai fait assembler avec mes ministres et mes secrétaires d’état pour vous dire que jusqu’à présent j’ai bien voulu laisser gouverner mes affaires par feu M. le cardinal ; il est temps que je les gouverne moi-même ; vous m’aiderez de vos conseils quand je vous les demanderai. » Puis, il donna l’ordre pour les différens services, et se tournant vers Foucquet : « Vous, monsieur le surintendant, ajouta-t-il, je vous ai expliqué mes volontés ; je vous prie de vous servir de Colbert, que feu M. le cardinal m’a recommandé. »

L’invitation était significative ; elle devait alarmer celui à qui elle était faite. Aussi Foucquet saisit-il la première occasion de son travail direct avec le roi pour lui faire sa confession, lui avouer ses fautes ; quelles fautes ? Il serait intéressant de les connaître ; sans