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REVUE DRAMATIQUE

Odéon : Roméo et Juliette, drame en 5 actes, en vers, d’après Shakspeare, par M. George Lefèvre. — Porte-Saint-Martin : Cléopâtre, de MM. Victorien Sardou et Émile Moreau. — Variétés : Ma Cousine, de M. Henri Meilhac. — Théâtre-Libre : l’Honneur, de M. Henry Fèvre.

Ce n’est certes pas nous qui reprocherons jamais à la direction de l’Odéon l’évidente complaisance qu’elle affiche pour Shakspeare. Si nous subventionnons en effet le second Théâtre-Français, c’est sans doute, et avant tout, pour qu’il accueille libéralement les tentatives des jeunes auteurs. C’est encore pour qu’il prépare des recrues au Théâtre-Français. Mais c’est aussi, je pense, pour compléter, en la diversifiant, l’éducation dramatique du public ; et quel meilleur moyen en pourrait-on imaginer que de jouer du Shakspeare ? Si M. Porel nous invitait quelque jour à venir entendre du Calderon ou du Lope de Vega, nous l’en féliciterions donc encore. Et, en attendant, après Macbeth, après Beaucoup de bruit de rien, après le Marchand de Venise, nous lui sommes obligés d’avoir mis cette année à la scène Roméo et Juliette, traduit et arrangé par M. George Lefèvre.

Je m’attends bien, ici, que M. George Lefèvre protestera contre ce dernier mot. Il dira qu’il a traduit le drame de Shakspeare, et il se défendra de l’avoir arrangé. Si, cependant, il a réduit à dix tableaux en tout les vingt-quatre changemens de scène du drame original ; s’il en a fondu plusieurs scènes en une seule ; s’il en a retranché force plaisanteries trop grossières, ou trop vulgaires, ou trop obscènes, — je ne dis pas pour le public français, mais pour le public moderne, quel qu’il soit, français ou anglais, allemand ou italien ; — si même il n’a pas